Destination : 174 , Ailleurs fait son cinéma


Sur la route au-delà des collines

Sur la route au-delà des collines



On l’a vu arriver un soir sur la route qui mène au-delà des collines. Avec juste un sac de voyage et un casque sur les oreilles. Il s’est installé à l’auberge du village.

Lui?? Un jeune homme comme les autres, avec sa musique, son jean et ses tennis qui n’ont pas l’air neufs. Un jeune poli et toujours souriant, sympathique en somme.

Peu à peu, des liens vont se tisser entre lui et les villageois. Il va beaucoup faire jaser: qui est-il? Le nom qu’il a donné est-il réellement le sien? D’où vient-il exactement? Que veut-il?

Il a l’air de chercher quelque chose ou quelqu’un, on ne sait pas. Il écoute, mais ne pose pas beaucoup de questions. Parallèlement, on s’aperçoit qu’il connaît bien l’histoire du village, le nom des habitants, et même certains secrets ...

Au fil des mois, les hypothèses les plus farfelues prennent forme. Ce jeune, qui s’appelle Giulio, accepté par certains, juste toléré par d’autres, parfois rejeté, est devenu le principal sujet de conversation, dans ce petit coin paisible de Lozère.

Le mystère de sa présence crée des rapprochements ou des hostilités inattendus entre les gens...



Un jour, un chenapan du village réussit à pénétrer dans la chambre du jeune homme.

Au fond de son sac, il découvre une photo et la subtilise.

Il la montre à ses copains dans la cour de l’école. L’un d’eux paraît très troublé. Il va finir par expliquer qu’il a vu la même dans la chambre du prêtre, le Père Laurent, où il est allé rôder un jour après le catéchisme, dans l’espoir de mettre la main sur l’argent de la quête.

Il s’agit du visage d’une toute jeune fille.

On ne connaît aucune famille à ce prêtre, installé ici depuis plus de vingt ans. Comment se fait-il que l’étranger possède la même photographie?

Les enfants parlent entre eux et l’institutrice surprend une bribe de conversation. Assez pour s’interroger à son tour.

Elle se confie à son mari, qui est le maire du village. Celui-ci, que toutes ces histoires autour du jeune homme irritent, va parler au prêtre. Qui finit par avouer la vérité.



(Ici, un flashback en noir et blanc permettra de revisiter le passé):

Il y a un peu plus de vingt ans, il venait de finir ses études lorsqu’il a été nommé dans le village pour son premier poste. (Il n’a d’ailleurs jamais voulu le quitter par la suite.)

Très vite, il est tombé amoureux d’Elise, la fille de l’épicier. Elle n’avait que quinze ans.

Malgré les reproches incessants qu’il s’adressait, il était très épris. Sans doute ne se serait-il rien passé si cet amour n’avait pas été réciproque. Mais Elise s’était également passionnément attachée au jeune prêtre. Un soir, elle l’a attendu au presbytère. Ils n’ont pu résister à cette attirance. Leur liaison a duré quelques mois.

Et Elise s’est retrouvée enceinte. Atterré devant l’ampleur du désastre, déchiré entre sa foi et son amour , le jeune prêtre a accepté d’accéder à la requête de sa bien aimée, terrorisée par la réaction prévisible de ses parents.

Il l’a aidée à fuir, en lui donnant ses économies afin qu’elle puisse s’établir ailleurs et accoucher sereinement. Ils sont partis une nuit claire, sur la route de l’est, celle qui conduit au-delà des collines. Il l’a accompagnée jusqu’à la gare de la petite ville voisine. Il était prévu qu’elle lui fasse parvenir son adresse. Mais elle ne l’a pas envoyée.

Il ne l’a jamais revue et ne s’est pas pardonné son manque de courage ainsi que la perte de cet amour qui avait illuminé sa vie, l’espace de quelques mois.

Sans compter sa culpabilité face aux parents d’Elise, malheureux, même s’il leur arrivait parfois de recevoir d’elle une carte disant qu’elle allait bien...



Ensemble, le prêtre et le maire vont voir le jeune homme, qui s’explique à son tour:

il est le fils d’Elise; sa mère lui a beaucoup parlé du village avec chaleur et émotion. Mais elle a toujours refusé d’y retourner. Et elle n’a jamais répondu aux questions qu’il a posées sur son père. Elle n’a pas non plus refait sa vie avec quelqu’un d’autre.

Le jeune homme a éprouvé le besoin vital de venir dans ce village, de comprendre, de retrouver la trace de son père.

Le prêtre livre la clé d’un autre mystère: ici, tout le monde le connaît sous le nom de Père Laurent, mais il est d’origine italienne et son vrai prénom est Lorenzo. Seule Elise connaît cette réalité; c’est sûrement la raison pour laquelle elle a prénommé son fils Giulio.



Un peu plus tard, sur la route qui va loin par delà les collines, Giulio s’en va. Mais il n’est pas seul. Le Père Laurent l’accompagne.



Un an plus tard...

Elise sourit à un homme, qui lui sourit à son tour. C’est Lorenzo. Il a quitté la soutane. On comprend qu’il a renoncé à son sacerdoce pour vivre avec celle qu’il n’avait pas oubliée.



Lilas