Destination : 187 , Animailleurs


murmures de la forêt

Murmures de la forêt





« Les voici ! Les voici ! Les voici ! », siffle la Nonnette, toujours la première à donner l’alerte, toujours à l’affût, perchée dans le grand chêne vert de l’entrée.

-« Voici qui ? Voici qui ? », s’enquit Dame Sitelle, venue, d’un coup d’aile, vive et svelte, aux nouvelles.

-« Oui, qui t’as vu ? Qui t’as vu ? », renchérit Chichibu.

-« Tarataratata ! » critique le pic, toujours sceptique…

-« Si ! Si ! Si ! Les voici ! Les voici ! »

-« Enfin ! Enfin ! », geignent les tourterelles, dans un froissement d’ailes se juchant sur la barrière, tapant d’un bec impératif sur le bois vermoulu.

Les voici, en effet : un klaxon, les portières claquent. Quelques instants plus tard la vieille maison ouvre ses paupières et s’éveille au soleil automnal.

« Enfin ! Enfin ! », geignent les tourterelles.

Tout le petit bois frémit de froufrous d’ailes et d’attentes frissonnantes.

La porte s’ouvre.

C’est elle qui paraît : la Bienfaitrice à tête blanche, portant à deux mains la vieille bassine rouillée, qu’elle dépose sous l’olivier argenté : la manne céleste, enfin !

Tout le petit peuple des oiseaux de la forêt, les mésanges bleues, les charbonnières, les nonnettes, les chardonnerets à tête rouge, les rouges-gorges et les geais bleutés, les merles et les sitelles masquées, moineaux et verdiers, tous à tire d’aile fondent sur les graines dorées.

La bienfaitrice émue les contemple. Immobile, elle regarde les oiseaux de la forêt. En adoration. Sur le pas de la porte l’homme sourit et la regarde contempler. Elle se retourne et lui sourit. Ils restent ainsi, longtemps, dans l’exaltation de l’amour et de la beauté.

Et puis, deux jours plus tard, ils s’en retournent, verrouillent la porte. La maison ferme ses paupières et se rendort.

Le rituel se renouvelle, chaque fin de semaine.

Chaque fin de semaine nous attendons que la maison s’éveille et ouvre ses paupières.

Chaque fin de semaine nous attendons l’apparition bénie.

Chaque fin de semaine l’homme et la femme sont en adoration.



« Les voici ! Les voici ! Les voici ! », siffle la Nonnette, toujours à la première à donner l’alerte, toujours à l’affût, perchée dans le grand chêne vert de l’entrée.

-« Voici qui ? Voici qui ? », s’enquit Dame Sitelle, venue, d’un coup d’aile, vive et svelte, aux nouvelles.

-« Oui, qui t’as vu ? Qui t’as vu ? », renchérit Chichibu.

-« Tarataratata ! » critique le pic, toujours sceptique…

-« Si ! Si ! Si ! Les voici ! Les voici ! »

-« Enfin ! Enfin ! », geignent les tourterelles dans un froissement d’ailes se juchant sur la barrière, tapant d’un bec impératif sur le bois vermoulu.

Les voici, en effet : un klaxon, les portières claquent.

Mais la maison ne s’ouvre pas.

D’autres humains sont là, de noir chagrin vêtus. La bienfaitrice approche du vieil olivier. Mais au lieu de déposer la rituelle manne elle ouvre une petite urne grise et verse quelques cendres sous le tronc argenté.

Plus tard.

Tous les humains sont partis, sauf elle. Elle reste immobile, à contempler l’olivier. Immobile sous la pluie. Tout le petit bois retient son souffle. Même les tourterelles se sont tues. Nous attendrons longtemps. Longtemps. Jusqu’à la nuit qui noya tout.

Le lendemain porte et fenêtres resteront fermées. La bienfaitrice n’est plus là. Seules restent l’urne grise et les cendres sous l’olivier.

Une détonation, soudain, comme celles qui font trembler l’air, l’hiver, les jours de chasse, où tombent en pluie grives et perdreaux. Une seule. Et puis plus rien.

Plus tard.

Bien plus tard, d’autres humains viendront, de noir chagrin vêtus, portant une urne grise. Ils verseront des cendres sous le vieil olivier. Et puis ils partiront.

Ils ont muré la porte.

Seule reste au-dehors une bicyclette oubliée.



« Les voici ! Les voici ! Les voici ! », siffle la Nonnette, toujours à la première à donner l’alerte, toujours à l’affût, perchée dans le grand chêne vert de l’entrée.

-« Voici qui ? Voici qui ? », s’enquit Dame Sitelle, venue, d’un coup d’aile, vive et svelte, aux nouvelles.

-« Oui, qui t’as vu ? Qui t’as vu ? », renchérit Chichibu.

-« Tarataratata ! » critique le pic, toujours sceptique…

-« Si ! Si ! Si ! Les voici ! Les voici ! »

-« Enfin ! Enfin ! », geignent les tourterelles, dans un froissement d’ailes, se juchant sur la barrière, tapant d’un bec impératif sur le bois vermoulu.

Les voici, en effet : un klaxon, les portières claquent..

« Enfin ! Enfin ! » geignent les tourterelles.

Tout le petit bois frémit de froufrous d’ailes et d’attentes frissonnantes.

La vieille maison ouvrira-t-elle ses paupières ? S’éveillera-t-elle au soleil automnal ?

La porte s’ouvrira-t-elle ?...

Jose