Destination : 63 , Surprise !


Chien et chat

Je l’appelle Moumoune, ma fille l’appelle Puce non sans malice, ces petites bêtes aiment particulièrement élire domicile dans son pelage soyeux. Elle s’ébat à longueur de journée dans la campagne, quelque soit le temps, tantôt elle court après les oiseaux tantôt elle grimpe sur le faîte des arbres. Rétive à notre mode de vie, elle miaule en pleine nuit pour se faire ouvrir la porte. Chasseuse dans l’âme, elle rebute ma mère qui la hait. Cette dernière l’a affublée d’un affreux collier à clochettes, espérant ainsi que notre fauve en miniature se fasse signaler des volatiles avant qu’elle ne les attrape.

Je l’appelle Chouchounette, elle s’appelle Sucette. Cette boule de poils qui a phagocyté le cœur de ma mère s’étale sans vergogne sur le canapé de la salle à manger. Mademoiselle, trop gâtée, ne fait plus aucun effort et gratte pour se faire transporter sur un fauteuil à sa hauteur. Sa petite taille de Yorkshire n’explique pas tout ! En fait, elle gratte pour tout. Pour avoir du rab dans son ordinaire, pour avoir un petit bout de la tranche de rôti que mon père avale au déjeuner. Elle prend le couloir pour un pissodrome, quand il ne s’agit pas de plus. Quand on l’appelle ; elle a une fâcheuse habitude de s’enfuir. Tout le monde lui cède. Elle ne craint pas les frimats de l’hiver : elle possède plusieurs manteaux pour le gel et pour la pluie. Le plus risible dans l’histoire, c’est qu’elle est la seule dans sa catégorie : aux alentours traînent des chiens utiles à la ferme, à la garde ou à la chasse. Elle aboie quand les autres aboient bien qu’elle ne sache pas pourquoi. Elle ne supporte pas que les invités partent et grogne pour signaler son mécontentement.

La cohabitation chien-chat n’a pas toujours été de tout repos. Quand Moumoune a rallié la maison, elle a reçu un accueil tout en croc de la part de Sucette. Cette dernière, les oreilles aplaties attaquait le chat qui de son côté faisait le dos rond, poil hérissé, tout en feulant. Quelques bonnes peignées plus tard, elles décidèrent d’un commun accord de s’ignorer superbement

Ce matin là, ma mère fit irruption dans ma chambre, affolée.
« viens vite » me dit-elle
a son air catastrophé, je ne pris pas la peine d’enfiler mes chaussons.
Désespérée, elle appelait :
« SUCETTE…
- …
- SUCETTE
- MIAAAOUUU
- SUCETTE !!!
- MIIIIIIAAAAAOUOUOU !
- Oh, non,ce n’est pas possible !!!! Sucette !!!
Et le chien de se frotter contre ses jambes tout en réclamant l’ouverture de la porte-fenêtre. Il avait une impérieuse envie de sortir depuis qu’il avait vu au travers de la vitre un moineau sautiller dans la cour de la ferme. A vrai dire, il ne comprenait pas ce qui lui arrivait : cette drôle de voix d’abord, puis cette envie soudaine de sauter partout. Ma mère, en panique, ne sut que faire. Arrivée en renfort, je libérai le chien qui se mit aussitôt en quête d’un arbre à gravir. Seulement, il n’avait pas l’habitude et prit peur. Il miaula désespérément jusqu’à ce que, venant à sa rescousse, je l’installai confortablement sur une branche. Il ronronna de fierté.

A la cuisine, Moumoune,grattait désespérément jusqu’à obtenir des petites faveurs . Elle grognait à la surprise de ma mère, tétanisée, d’habitude si prompte à lui administrer des coups de pieds. Mais que faire devant un chat qui aboie ?
Malgré l’air réprobateur de ma génitrice, je pris sur moi de lui donner les friandises pour chiens et de l’installer confortablement sur le canapé, devançant le fait qu’elle aurait pu gratter, geste incompatible entre les griffes d’un chat et une assise en cuir. Moment délicat : fallait-il la sortir en laisse pour lui faire faire ses besoins ?
Expérience concluante. Moumoune fit ce qu’elle avait à faire sans même tirer sur la laisse.

Les animaux étant satisfaits, il était grand temps que je m’occupe d’une mère déboussolée.
Et elle de me dire dans un souffle quasi inaudible : « En fait, je ne suis pas ta mère, je suis ton père… ».

Pomalot