Destination : 187 , Animailleurs
En discutant avec une amie libraire, grande lectrice insomniaque, j'ai
appris que son livre de l'année était un livre dont je n'avais pas
entendu parler : « anima » de Wajdi Mouawad. Elle m'expliqua la quête
d'un homme parti à la recherche du meurtrier de sa femme et de la
fabuleuse idée de l'auteur : nous conter l'histoire par l'intermédiaire
d'animaux qui racontent. Il parait que ce n'est absolument pas déroutant
ni artificiel, que les animaux se relaient le plus naturellement du
monde. Il me semble que vous avez pu entrevoir la destination, elle
s'annonce simple dans son énoncé : vous mettre dans la peau d'un animal
qui nous racontera ce que bon vous semblera. Je pense qu'il pourrait
être bon de ne pas caricaturer l'animal ni que celui-ci dise « je suis
le moustique », en effet, on ne dit pas « je suis l'homme » quand on
parle. Vous pourrez ou non annoncer dès le départ qui parle. Vous
pourrez aussi faire se relayer plusieurs animaux. L'animal peut raconter
ce que font des humains ou raconter une histoire d'animal, etc...
Ouvrez-vous le champ des possibles, galopez-y, dansez-y, voletez-y !
François Busnel raconte ce coup de coeur :
Tout débute par un crime monstrueux, en plein Montréal. Une femme
enceinte est assassinée, éventrée et violée. Son mari veut retrouver le
coupable. Moins pour le tuer, affirme- t-il, que pour voir son visage.
Pour échapper à la folie qu'il sent rôder depuis que ce meurtre a
piétiné sa vie. Assez rapidement, la police lui apprend que l'assassin
est un Indien et qu'il a trouvé refuge dans une réserve. Tout aussi
rapidement, on découvre que ni la police ni la communauté indienne de la
réserve n'arrêteront le coupable. Il faudra se débrouiller seul. Tout
cela ne serait qu'un énième polar sans beaucoup d'envergure, déjà lu et
relu, si Wajdi Mouawad n'avait eu l'intuition - géniale - d'inverser la
perspective : pour évoquer la part monstrueuse des hommes, il fait
parler les bêtes. Ce sont eux, les animaux, qui racontent... Un chien,
un chat sauvage, un poisson rouge, une araignée, une fourmi, une
corneille, un scarabée, un chimpanzé et même un boa constrictor : tous
sont témoins de l'agitation des hommes, rapportent ce qu'ils voient et
entendent. Déjà fait ? Oui, mais pas comme ça.
Anima est une réussite majeure parce que jamais la thèse n'écrase la
fiction. On redoute le roman à clef, et c'est exactement l'inverse qui
nous est offert : fluidité, limpidité, lumière crue jetée sur la part
d'ombre de chacun. Sans verser dans le récit démonstratif et pesant,
Mouawad propose une version moderne des mythes fondateurs de l'humanité
en usant des codes des meilleurs thrillers.
http://www.lexpress.fr/culture/livre/francois-busnel-a-lu-anima-de-wajdi-mouawad_1180923.html
/>
Sur le site de l'éditeur :
http://www.actes-sud.fr/catalogue/litterature/anima on y lit la génèse
du roman racontée pa
extrait lu par l'auteur et interviews :
http://www.actes-sud.fr/contributeurs/mouawad-wajdi