Destination : 191 , Mal


Je ne sais trop comment cette destination est venue, toujours est-il
qu'elle est arrivée, elle a frappé à ma porte, je lui ai ouvert et il me
faut maintenant vous la présenter. Tout cela pour vous dire que parfois,
je ne trouve pas les destinations, ce sont elles qui s'imposent.

Le mal, donc. Ce ne sera pas si facile. Normal, parce que le mal, ça ne
fait du bien. Je ne suis même pas sûr qu'il existe vraiment. C'est
peut-être tout le noeud de l'affaire. Croire au mal, c'est aussi croire
au bien, cela pose la question du libre arbitre, du destin et de notre
condition humaine (aussi la question de Dieu). Rien que cela.

C'est une question qui me travaille depuis longtemps : comment les
sociétés humaines évoluées peuvent-elles sombrer dans les pires
abominations... Je prétends qu'aucun peuple, aucune civilisation n'est
exempt de crimes de masse ou autres génocides, qu'il n'y a de périodes
de l'humanité qui ne soit vierge de guerres et autres abominations, que
chaque société est corrompue par un ou plusieurs maux... Vous devez vous
dire « pas très optimiste notre JFP ». Pas du tout, c'est une forme de
réalisme et de constat qui paradoxalement m'apaise !

Deux auteurs m'ont troublé sur cette question : le premier est un
journaliste, Jean Hatzfeld, qui a écrit en 2007 « la stratégie des
antilopes », livre que j'ai trouvé formidable mais que je n'ai pu
terminer : trop dur. Il donne la parole aux protagonistes du génocide
rwandais, sans les juger, c'est le troisième tome qui fait suite à « une
saison de machettes ». A lire.

Le deuxième auteur dont j'ai lu de nombreux articles et extraits :
Hannah Arendt, philosophe qui est allée couvrir pour le magazine
américain « The New Yorker » le procès du SS Eichmann qui se tint à
Jérusalem en 1961. Hannah Arendt est l'héroïne d'un film biographique
que je n'ai pas (encore) vu. Elle a développé le concept de banalité du
mal, concept révolutionnaire en 1963 et qui va à l'encontre des
histoires populaires qui présentent depuis la nuit des temps les êtres
maléfiques comme étant des monstres barbares et démoniaques.

Ce que je retiens d'Hannah Arendt, de Jean Hatzfeld et d'autres
également, qui me confortent dans cette idée, c'est que le mal est tapis
en chacun d'entre nous, que notre condition humaine ne peut échapper à
cette défaillance morale qui peut-être peut nous faire basculer nous
aussi du mauvais côté. (Les spécialistes d'Arendt s'offusqueront de ma
caricature de sa pensée.)

Il est bien gentil notre JFP avec son petit cours de morale, mais
qu'est-ce qu'il nous propose au cours de cet atelier ? Quelque chose de
simple, c'est vrai que j'aurais pu commencer par cela, mais c'est bien
d'amener les choses ainsi. Je vous propose d'écrire un texte où le mal
sera présent : que vous en ayez été la victime où que vous ayez produit
ce mal vous-même. Petite mise en garde, cet atelier n'est pas un
confessionnal (ni un commissariat), aussi nous vous saurions gré de ne
pas avouer de crime atroce !

Le mal sera ou non l'élément central de votre texte, la fiction et la
poésie peuvent également être de la partie.

Volontairement je ne souhaite pas définir le mal ni explorer tous ses
possibles afin de vous en laisser la libre interprétation.

Une piste possible peut aussi être d'aller s'inspirer de tableaux tels
que Guernica, l'Apocalypse de Saint-Sever ou encore d'aller vers la
littérature : les fleurs du mal de Baudelaire. Un essai de Georges
Bataille peut lui aussi vous intéresser : la littérature et le mal
http://fr.wikipedia.org/wiki/La_Littérature_et_le_Mal />

Il vous convaincra que nous ne saurions écrire en nous éloignant du mal.

http://horslesmurs.ning.com/profiles/blog/show?id=1302569%3ABlogPost%3A1204
(extraits de la stratégie des antilopes)

http://agora.qc.ca/Dossiers/Hannah_Arendt

http://www.bibliomonde.com/auteur/jean-hatzfeld-160.html

Bon courage,

JFP

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