Destination : 206 , 99 test
Ford Madox Ford* - si ça ce n’est pas un nom d’écrivain ! – (1873-1939) était un poète, écrivain, critique et éditeur britannique. Auteur plutôt fécond, il est cependant tombé dans un oubli certain comme nombre de romanciers de son époque. Un de ses romans, « le bon soldat », semble traverser le temps et mériter lecture** ! Nous retiendrons de son activité d’éditeur l’invention d’un test, le test de la page 99. Il prétendait pouvoir se faire une idée définitive d’un livre en en lisant uniquement la page 99.
Aujourd’hui, un site anglais est exclusivement voué à ce fameux test qui consiste à vous fournir la page 99 d’œuvres.*** D’autres médias littéraires font aussi de même.
Je vous propose aussi de jouer avec ce test, de différentes manières :
- la première : vous vous inspirez librement d’une des pages 99 que je vous fournis plus bas (possibilité de puiser des idées, d’écrire la page 100, …) vous pouvez aussi combiner plusieurs pages 99. Les extraits choisis sont plutôt d’actualité, ils sont parfois à la littérabilité discutable, ils se veulent de la matière à écrire parce que l’écriture fait feu de toute encre !
- la deuxième : vous inventez la page 99 d’une œuvre que vous auriez écrite…
- la troisième : sans tricher, vous fournissez la page 99 d’un livre que vous avez déjà écrit. Je dis sans tricher, parce qu’il faut vous imaginer que Ford Madox Ford prenait vraiment la page 99, quelle qu’elle soit ! Je n’aime pas trop cette possibilité parce qu’elle ne donne pas lieu à un travail d’atelier, mais à un simple copié-collé, aussi, merci de vous en auto-limiter l’usage à une page 99 par personne !
- la quatrième, un peu folle, vous prélevez les 9ème, 19ème, 29ème, 39ème, 49ème, 59ème, 69ème, 79ème, 89ème et 99ème mot d’un texte / livre et vous les utilisez dans un texte à votre tour. Je propose qu’on appelle cet exercice le 9 JFP 9 test… Qui est une forme de logo rallye.
Bien sûr vous pouvez trouver encore d’autres manières de traiter cette destination, nous nous en délecterons !
JF Mad JF
* http://fr.wikipedia.org/wiki/Ford_Madox_Ford
** http://www.liberation.fr/livres/1995/01/19/le-bon-soldat-don-juan-gentleman_119313
*** http://page99test.com/ (décevant)
Les pages sélectionnées :
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Pétronille d’Amélie Nothomb
Extrait de la page 99
Je laissai Pétronille déjeuner d'un croque-monsieur et je fonçai à la supérette. Comme champagne, on ne vendait que du Piper-Heidsieck. Je revins avec mon sac à dos lesté de deux bouteilles. Après que nous fûmes remontées par le tire-fesses, j'annonçai à mon amie que je resterais là et qu'elle devrait me rejoindre une demi-heure plus tard. À peine fut-elle partie que j'enterrais les deux bouteilles dans la neige.
"Quelle région merveilleuse ! pensai-je. Aucun besoin de seau à glace !" (...) La poésie japonaise a raison : la contemplation des paysages est ce qui nous révèle le mieux.
Pétronille revint en déclarant qu'elle en avait sa claque.
- J'espère qu'elle est bien, ta surprise.
J'exhumai l'une des bouteilles de champagne. Après avoir ouvert des yeux éblouis, elle eut une réflexion typique d'elle :
- Évidemment, tu n'as pas prévu de flûtes. Je déneigeai alors la deuxième bouteille.
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After d’Anna Todd
Extrait de la page 99
"Sans écouter le prof jusqu'au bout, j'attrape mon sac à la volée et me rue vers la sortie. Au milieu du hall, j'entends la voix d'Hardin hurler dans mon dos:
- Tu ne vas pas t'échapper cette fois, Theresa!
Je sors, mais alors que j'ai déjà traversé la pelouse, il me rattrape et m'empoigne par le bras. Je me dégage brusquement.
- De quel droit tu me touches tout le temps comme ça? Si tu m'attrapes encore une fois le bras, je te flanque ma main sur la figure!
Je suis la première surprise de la violence de mes paroles, mais j'en ai plus qu'assez de ses conneries. Pourtant, quand à nouveau il me saisit le bras, je suis incapable de mettre ma menace à exécution.
- Qu'est-ce que tu veux, Hardin? Me dire à quel point je suis pathétique? Te moquer de moi pour être tombée dans le panneau encore une fois? J'en ai vraiment marre de ce petit jeu. Je ne joue plus. J'ai un copain qui m'aime, et toi tu es détestable. Tu devrais vraiment te faire soigner pour tes sautes d'humeur. Je n'arrive pas à te suivre. Un moment tu es gentil, l'instant d'après tu es exécrable. Je ne veux plus rien avoir affaire avec toi. Alors, rends-toi service, trouve une autre meuf pour jouer à tes petits jeux, moi, c'est terminé!
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Elle & lui de Marc Lévy
Extraits de la page 99
"- Vous voulez m'y envoyer seul ?
- J'ai des rendez-vous à ces dates-là. (...)
- Impossible, réplique Paul en opinant de la tête.
Bien que les tables voisines fussent inoccupées, Gaetano se pencha vers son auteur et se mit à chuchoter.
- Votre avenir se joue là-bas. Si vous confirmez votre triomphe en Corée, c'est toute l'Asie que nous serons en mesure d'intéresser à vos écrits. Pensez au Japon, à la Chine, et si nous nous débrouillons correctement, nous pourrions même convaincre votre éditeur américain de surfer sur la vague. Une fois que vous aurez vraiment percé aux Etats-Unis, vous ferez un tabac en France, les critiques vous adoreront.
- Mais j'ai percé aux Etats-Unis!
- Avec votre premier roman, cependant, depuis...
- Je réside en France! Pourquoi devrais-je passer par l'Asie et l'Amérique pour qu'on lise mes livres à Noirmoutier ou à Caen.
- Entre vous et moi, je n'en ai pas la moindre idée, pourtant c'est ainsi. Nul n'est prophète en son pays, et encore moins un étranger."
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Assasin’s creed unity d’Anton Gill
"Il jeta un coup d'oeil à la porte. Nul doute que madame Levène avait son oreille pressée contre elle, et c'est à son adresse qu'il dit à haute voix:
- Et assurez-vous d'utiliser votre plus belle écriture, mademoiselle.
Plus calme, il se pencha vers moi.
- Tu te rappelles les deux hommes qui t'ont attaquée, bien sûr?
- Comment pourrais-je oublier ?
- Eh bien, continua-t-il, j'ai promis à ta mère que je retrouverais le gaillard qui portait la tenue de médecin, et je pense l'avoir fait.
Je le dévisageai.
- Oui, bon, d'accord, admit-il ça m'a pris un moment. Mais je l'ai retrouvé, c'est l'essentiel.
(...)
- Qui est-ce ?
- Il s'appelle Ruddock, et c'est bel et bien un Assassin, ou du moins il en était un. Il semble qu'il ait été excommunié de l'Ordre; depuis, il tente de le réintégrer.
(...)
- Est-il possible qu'il ait espéré que tuer Mère lui permettrait de rentrer dans les bonnes grâces de son ordre?
Mr Weatherall me lança un regard impressionné.
- Ça pourrait très bien être le cas, même si je ne peux m'empêcher de penser qu'une telle stratégie aurait été vraiment stupide de sa part. Le fait de tuer ta mère aurait tout aussi bien pu accroître l'ampleur de sa disgrâce; il n'avait aucun moyen de le savoir."
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Le Minotaure planétaire de Yanis Varoufakis
Extraits de la page 99
"Puisqu'il lui est impossible de s'affranchir de son humanité, puisqu'il est impossible à un être doué de conscience de se débarrasser de ce lourd fardeau en avalant une pilule bleue (comme au début de MATRIX), le travailleur humain reste le dernier bastion à refuser d'être investi entièrement par le marché. Son "humanité" n'est tout simplement pas à vendre. C'est cet entêtement persistant qui explique la constante prépondérance du contrat de travail -accord irrémédiablement incomplet entre la main-d'oeuvre et le Capital, qui agit à la fois comme la source de l'instabilité et la source de la valeur."
"Même si nous le voulions, il nous est impossible de nous transformer en marchandise à part entière. Cette incapacité est peut-être même ce qui explique pourquoi nos systèmes économiques sont sujets aux Crises (avec un grand C). Plus les entreprises réussissent à transformer le travail en activité mécanique intensive, plus la valeur globale qu'elles génèrent à long terme est faible et plus nos sociétés de marché se rapprochent d'une Crise."
"Les sociétés de marché s'épanouissent lorsque la marchandisation, la financiarisation et l'innovation technologique sont en hausse. Plus la production se rationalise et se mécanise, moins la contribution humaine à cette production est importante et moins elle coûte. Enfin, plus on essaie d'augmenter le rendement de la contribution humaine au processus de production, plus faible est la valeur intrinsèque de chaque unité produite."
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Merci pour ce moment de Valérie Trierweiler
Extrait de la page 99
Ce jour-là, un confrère plus aguerri m'a prévenue: -Reste avec moi, Mitterrand recevra après la cérémonie une quinzaine de journalistes dans un petit salon, je t'emmènerai avec moi.
C'est ainsi que je me retrouve avec l'élite de la presse à écouter avec dévotion le Président de l'époque. Laurence Masurel (rédactrice en chef de PARIS-MATCH, ndlr) me repère quand je sors de ce salon avec le groupe de privilégiés et nous prenons contact. Je n'ai que vingt-quatre ans et pour la deuxième fois, François Mitterrand vient de changer mon destin. Comment imaginer que je serai un jour aux côtés d'un autre Président, que je foulerai moi aussi le tapis rouge, déroulé dans la cour d'honneur du palais de l'Elysée pour la cérémonie d'investiture?
Ce jour-là, j'ai cherché à retrouver ce fameux salon attenant à la salle des fêtes. Je n'ai pas su le reconnaître avec certitude. Vingt-cinq ans étaient passés. Vingt-cinq ans! Les années ont filé comme l'éclair. Je me suis mariée deux fois, j'ai divorcé deux fois. Et j'ai eu mes trois garçons, ma première préoccupation, ma plus belle réussite, ceux à qui je tiens le plus au monde.
Mon arrivée à PARIS-MATCH en 1989 se fait sur la pointe des pieds. Laurence Masurel, à qui je dois énormément, me teste comme pigiste.