Destination : 225 , Mang’Ailleurs
J’ai appris récemment que je faisais partie de la « génération manga », celle bercée par les dessins animés japonais achetés par Dorothée à la fin des années 70. A l’époque, les français les ont achetés par lots sans prendre conscience que là-bas (au Japon) ils n’étaient pas uniquement destinés à un public enfantin mais sont un art populaire qui se lit et se regarde à toutes les sauces, par tous les publics. Bien avant la découverte de Hayao Miyazaki, je fus donc irrigué par cette culture qui du coup est la culture commune de ma génération : Goldorak, Candy, Capitaine Flam, Albator, etc…
Qu’en reste-t-il aujourd’hui ? Je crois que finalement une certaine poésie, un attrait pour le Japon, un goût pour les dialogues directs, une certaine idée du fantastique m’ont imprégné. Bien entendu, j’ai aussi été influencé par d’autres cultures… Je crois juste que j’ai longtemps minoré celle-là, voire l’ai-je dépréciée? Rappelons-nous à cette occasion une idée phare de Claude Levi-Strauss : « Il n’y a pas de culture supérieure à une autre ». Cette maxime, je me la repasse souvent quand je suis tenté de juger certaines cultures jeunes actuelles. Après tout, les mangas des années 70-80 devaient faire de nous des êtres violents complètement incultes…
J’aimerais donc vous faire voyager au pays des mangas cette quinzaine sur Ailleurs. Plusieurs itinéraires s’offrent à nos pas et sont susceptibles de nous inspirer pour écrire.
Tout d’abord, j’aime la modestie de l’étymologie du terme « manga » qui signifie « image dérisoire » ou « dessin non abouti ». Cela fait un premier chemin à emprunter, l’idée d’écrire un texte qui cherche juste à décrire de manière spontanée une image, sans trop se préoccuper du sens ni du côté narratif. On recherchera même cette idée de brouillon, de « non abouti », on pourra rapprocher cela du caractère des haïkus, de l’estampe japonaise .
L’autre jour (impossible de retrouver l’émission radio), j’écoutais une émission littéraire parlant entre autres des japanimes (films d’animation d’origine japonaise), émission très intéressante traitant de cette période des années 70 où les japonais produisirent nombre de dessins animés bon marché. Contrairement à ce que je pensais, j’appris que les comics américains et plus encore Walt Disney influencèrent les japanimes. Mais ces derniers avaient leurs propres codes et leurs propres contraintes. Ainsi, ils avaient souvent besoin d’être plus économiques et utilisaient des plans fixes pour illustrer certaines scènes. Par exemple, pendant qu’une personne parle d’un malheur, un plan fixe montre des gouttes d’eau qui tombent d’un toit dans un tonneau ; ou encore pour une tirade romantique, on peut admirer une fleur blanche isolée au milieu de l’herbe. Ces plans participent à la fois à la poésie japonaise et à l’économie de dessin nécessaire. Je vous propose d’utiliser cette technique dans un texte qui sera ainsi ponctué aux bons moments des descriptions nécessaires et évocatrices…
Troisième piste : une autre gestion temporelle. Alors que la BD classique européenne ou américaine divise généralement le temps de manière plutôt rationnelle et linéaire, le manga peut agir différemment, les cases et les pages illustrant abondamment un temps parfois bref où le temps peut alors se suspendre voire même ne plus suivre l’ordre chronologique, comme s’il était éclaté, comme si différent points de vue se superposaient. A vous d’écrire un texte de cette manière, avec un temps « éclaté », où différents points de vue se chevauchent.
Dernière piste : de l’importance du héros. Un peu comme dans les comics américains, mais a contrario de la BD européenne (où l’histoire prime souvent), le manga est très souvent centré sur un héros avec lequel nous allons passer notre temps, nous y identifier. Sa psychologie et tout ce qui touche sa vie sont ainsi très développés, sachant que le manga si il aime l’action n’est pas avare en nombre de pages et de plans. Vous aussi écrivez un texte avec un héros central, pourquoi pas d’inspiration japonaise ?
Enfin, je suis sûr qu’il y a d’autres routes possibles permettant d’explorer littérairement les mangas et ce sera avec plaisir que vous nous ferez découvrir ces itinéraires !
Liens utiles :
http://www.gachan.org/ site très didactique et très intéressant.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Anime nous éclaire sur l’anime ou japanime.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Manga définitions sur le manga
Pour la référence culturelle, je vous invite à vous pencher sur l’œuvre magnifique de Miyazaki qui m’a bouleversé et enchanté avec notamment : « mon voisin Totoro », « le voyage de Chihiro » et « le vent se lève ». Une virée sur le site suivant peut aussi vous offrir des itinéraires bis passionnants avec les esprits de la forêt, les noiraudes, etc…
http://www.kanpai.fr/culture-japonaise/biographie-hayao-miyazaki
Bonnes planches !