Destination : 309 , Fondation Ailleurs
Encore une destination étrange. Que voulez-vous, l’inspiration est une muse capricieuse qui choisit ses voies propres.
Par l’intermédiaire d’un jeune, j’ai découvert le site d’écriture collaborative « fondation SCP ». Vous irez y jeter un coup d’œil, c’est particulièrement déroutant.
Qu’est-ce que la fondation SCP ? C’est un peu une sorte d’organisation virtuelle qui se donne pour but de protéger, contenir et sécuriser. Oui, mais de quoi me direz-vous ? C’est un petit délicat à expliquer.
Reprenons au début. Il y a quelque chose comme une dizaine d’années, une bande de joyeux internautes américains férus de phénomènes paranormaux ont beaucoup échangé sur des forums spécialisés à propos « d’objets étranges » (et loufoques qu’ils avaient imaginés pour rigoler). Voyant leur plaisanterie prendre de l’ampleur, ils ont imaginé monter un site d’écriture collaborative : la fondation SCP.
Que vient faire l’écriture ici ?
C’est en quelque sorte l’objet même de cette fondation. Puisque tout est imaginé, ils ont choisi de le faire par écrit, et d’une manière particulièrement codifiée qui nous intéressera ici.
Approchons-nous un peu plus.
La majorité des écrits de la fondation sont des « rapports ». Ils visent à décrire de manière objective des objets à caractère dangereux. Il faut donc expliquer en quoi ils sont dangereux, où ils se trouvent, comment ils agissent. Notez que les objets sont classés en trois catégories (de danger) : - Sûr, les objets sont vraiment bizarres mais pas très dangereux, on sait les confiner pour s’en protéger.
- Euclide, les objets sont encore plus étranges, plus dangereux mais on ne sait pas les confiner, à terme les Euclide finiront peut-être en « sûr » ou en « Keter ».
- Keter, alors là, les objets sont particulièrement dangereux et zarbis, ils menacent parfois même l’humanité, les confiner est particulièrement difficile et complexe.
Je ne vais pas vous conter tout ce qui tourne autour de la culture « SCP », mais il y a des niveaux d’habilitation, des condamnés qui testent la dangerosité des objets, des objets qui interagissent les uns avec les autres…
Les joueurs invétérés de jeux en lignes et autres geeks sont paraît-il au courant de cette étonnante culture que je découvre avec curiosité. Plusieurs milliers de personnes à travers le monde entier sont membres de la fondation et je vous invite à naviguer sur la branche française. Les rapports les mieux écrits sont les mieux notés et sont ceux qui restent sur le site, garantissant ainsi une certaine qualité littéraire.
Si je vous propose cet atelier, c’est parce que l’on retrouve ici tout ce qui fait un bon atelier d’écriture : des personnes motivées par l’écriture, des contraintes d’écriture, des commentaires sur les écrits des uns et des autres.
Pour le plaisir, je vous décris rapidement ici quelques objets emblématiques de la fondation :
- le plus connu et un des plus anciens : le SCP-173. Il s’agit d’une statue en béton de forme assez humaine et peinte à la bombe. Elle est immobile tant qu’on la regarde mais se déplace à vitesse fantastique dès qu’on ne la regarde plus (battement de paupière) et vous brise la nuque ! Le confinement vise à la mettre à l’abri de tout regard ou de toujours aller la visiter à trois pour qu’il y ait toujours un regard sur elle.
- SCP-087. C’est une porte apparemment en bois, qui une fois ouverte débouche sur une sorte d’escalier descendant et obscur plus ou moins sans fond. En bas, que de l’horreur : ça absorbe la lumière, des cris horribles se font entendre et on n’en remonte pas vivant ! Procédure de confinement simple : ne pas entrer !
- SCP-038. C’était probablement un gentil pommier du côté de New-York. Oui, mais voilà qu’il avait la propriété de cloner tout ce qui touchait son écorce. Une bouteille de vin touche son écorce ? Voilà que notre gentil pommier se met à pondre la même bouteille. Après expériences, il s’est avéré que ledit SCP ne pouvait cloner un objet de plus 90 kg. (des membres de la fondation auraient abusé de l’objet.) Procédure spéciale de confinement : pommier enfermé dans une salle spéciale avec éclairage et arrosage bruimisé automatique, intervention manuelle avec combinaison spéciale (hazmat).
Comment se présente un rapport SCP ?
- Nom de l’objet
- Classe
- Procédure de confinement spéciale
- Description
La description comme la procédure de confinement est écrite dans un style « scientifico-policier » et n’hésite pas à masquer, cacher les noms, lieux, qui feraient encourir des risques.
- addendum : ce sont des ajouts, des notes additionnelles, probablement écrites après le rapport pour faire part de nouvelles informations utiles, pour parler des suites de l’affaire. Les addendum sont numérotés : #1, #2, etc.
Il va de soi que je ne vous prends pas pour une bande d’adolescents en mal de sensations et que je ne vous obligerai pas rédiger un rapport SCP, mais c’est une piste sérieuse à envisager.
Deuxième piste : après avoir visiter la fondation, vous choisissez un objet, une procédure, un ou plusieurs éléments que vous intégrez à un texte de votre cru.
Troisième piste, peut-être la plus intéressante et la plus ambitieuse. Vous vous inspirez de la « structure SCP » pour écrire un texte dans un autre champ.
Je m’explique.
Prenons le cas d’une fondation « petits plaisirs quotidiens » (Fondation PPQ).
Nom de l’objet : PPQ-001 « retour du travail »
Classe : ordinaire
Procédure d’appréciation : souffler. Tout est dans le souffle pour apprécier cet objet. Souffler, c’est expirer pleinement l’air emmagasiné dans nos poumons. Mode de déplacement : de préférence à pied, le retour est un acte physique de transition entre un moment actif et parfois contraint et un moment de détente, relâchement vers un état plus oisif et plus ouvert. Sens : la vue. Cette dernière doit pouvoir se poser avec nouveauté et curiosité sur l’ensemble du parcours.
Description : rentrer du travail à pied, avoir ce sentiment d’une journée pleine et remplie que l’on laisse derrière soi. Repenser rapidement à quelques moments clés, entrecoupés de découvertes visuelles le long du parcours (une connaissance que l’on salue, parfois on prend le temps de discuter, remarquer un jardin que l’on avait pas encore vu…) Poser ses pas d’abord de manière rapide et affirmée, puis de manière de plus en plus légère et insouciante. Finir par apercevoir le seuil de sa maison, ouvrir la porte d’un chez soi accueillant, relever sa boîte aux lettres. Enlever ses chaussures comme acte définitif du retour.
Addendum #1 : le retour en voiture arrive aussi, il est important de prendre le temps avant de démarrer son véhicule, choisir l’ambiance sonore : informations, musique ou humour, en adéquation avec le besoin du moment. Rentrer lentement, le temps gagné par le retour n’existant pas (cf PPQ-007 « temps perdu adoré »)
Addendum #2 : le retour à plusieurs est proscrit ici, trop de variables venant perturber le PPQ-001 pour pouvoir le garantir. A noter que des agents ont tenté des PPQ-001 à plusieurs avec réussite, mais dans des occurrences trop rares pour en garantir la réussite.
Addendum #3 : Notice météo. Un PPQ-001 réussit se prépare dès le matin ( cf PPQ-018 « départ heureux ») en consultant la météo du jour prévue pour avoir à sa disposition la tenue qui permettra un retour réussi : parapluie, pull, casquette, lunettes de soleil, sac à dos permettant d’ôter les vêtements superflus…
Voilà, vous aussi, faites-vous plaisir avec cette destination, prenez-vous au jeu, tout est possible comme d’habitude, tordez les consignes à l’extrême si nécessaire et … écrivez !
http://fondationscp.wikidot.com/ Branche française de la fondation SCP
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fondation_SCP Site mère
http://www.vice.com/fr/article/j545pd/de-creepypasta-a-reseau-creatif-hors-norme-lepopee-de-la-fondation-scp Avec plein de mots « geeks » que je ne connais pas !
http://www.youtube.com/channel/UC98_N9Y9d5Lh8ZoIdPxggeA/videos Pour celles et ceux qui aiment les vidéos, ce youtubeur produit des vidéos amusantes.