Destination : 336 , Histoire des colles


Oui, je ne peux m’empêcher de faire un jeu de mot pour aborder cette destination. Il sera ici question d’histoires d’écoles. Il est plus que probable que cent pour cent des personnes qui fréquentent cet atelier aient un jour mis les pieds dans une école pour plusieurs années si ce n’est plus !
Cela fait plus de quarante ans que chaque mois de septembre est synonyme de rentrée et que chaque fin d’été j’ai ce petit pincement au cœur où se mêlent crainte, excitation, envie d’y retourner… Un petit peu peut-être comme le drogué qui sait qu’il va avoir sa dose mais qui sait aussi que ce n’est pas sans effets secondaires. Chaque année, je crois qu’on a déjà tout traversé et tout connu, dans le bon comme dans le mauvais sens, pourtant il y a toujours du nouveau, du surprenant, du magnifique et de l’effroyable. Cette année, entre le confinement, les cours avec masques et le terrible acte terroriste contre un professeur est une année particulièrement mouvementée, sans omettre les mille et unes vicissitudes qui émaillent la vie particulière d’une classe, d’un établissement, dont je vous ferai grâce ici.
Vous aurez donc le loisir au cours de cette destination de vous replonger dans votre scolarité, qui comme la mienne je suppose, a connu ses hauts et ses bas, ses moments de joie et de tristesse. Vous pourrez vous mettre dans la peau d’un professeur, d’un élève, relater un dialogue d’hier ou d’aujourd’hui…
Le domaine est vaste : des menus de la cantine en passant par les rédactions d’antan, de l’ambiance d’un préau à celle d’une classe découverte, du cours de sport à celui d’un professeur de philo déjanté, vous aurez l’embarras du choix. Faire œuvre de fiction est possible également, pourquoi ne pas imaginer une école utopique, une classe du futur (par transmission de pensées, c’est mieux que par ondes wifi) ?
Ne pas négliger les angles décalés : la vision d’un étranger lors d’un échange scolaire, celle de la craie devenue feutre à tableau blanc, les jouets de cour de récréation, l’arrivée de la photocopieuse…
De nombreux auteurs, et pas des moindres, ont écrit leurs souvenirs d’école et je me souviens avec bonheur et nostalgie de la joie que j’ai eu de lire Marcel Pagnol, Hervé Bazin, Joseph Joffo, Alain Fournier, respectivement dans « la Gloire de mon père », « Vipère au poing », « un sac de billes », « le Grand Meaulnes ». Ces livres avec lesquels se mélangent l’histoire racontée et mes souvenirs d’écolier.
Plus proche de notre époque, j’avais apprécié la lecture il y a quelques années d’un Daniel Pennac : « Chagrin d’écoles ». L’auteur y racontait son expérience d’ex-cancre devenu professeur de lettres. Cela me fit d’autant plus sourire que des cancres comme lui, j’aurais bien aimé en avoir plus dans mes classes !
Parmi mes souvenirs d’école les plus forts, il y a ceux des odeurs (il paraît que les souvenirs olfactifs sont les plus puissants). Je me souviens de ces ardoises cerclées de bois, noires d’un côté et quadrillées de l’autre, avec lesquelles il fallait utiliser d’authentiques craies et de petites éponges rondes que nous conservions dans des boites en plastique. J’aimais l’odeur que délivrait cette boite, une odeur humide où se mélangeaient celle de la craie et de l’ardoise. La deuxième odeur puissante qui me revient est celle de l’encre en cartouches qui alimentait des stylos plumes baveux et capricieux, indissociables de celle des effaceurs qui magiquement nettoyaient nos doigts malhabiles en les imprégnant durablement d’une odeur chimique caractéristique. Ma troisième odeur est celle des colles (vous voyez que ce n’est pas un jeu de mot gratuit). La première fut celle des colles Cléopâtre qui nous étaient distribuées gratuitement et que certains prétendaient mangeables. Mes parents disaient que c’était comme le mélange d’eau et de farine de leur enfance, mais on n’a jamais fait le test. Ces colles ont rapidement été supplantées technologiquement par les bâtons de colle autrement plus pratiques et plus efficaces mais qui avaient la fâcheuse tendance à ne durer qu’un temps éphémère et qui émettaient une bien faible odeur. Bien plus intéressants furent les tubes métalliques d’une colle très liquide avec une odeur éthérée très prononcée. Tubes liquides qui s’éventraient régulièrement dans une trousse ballottée comme un monocoque sous les quarantièmes rugissants. Combien de fois au comble de l’ennui scolaire cette colle m’a permis de me soustraire en recouvrant une gomme, un doigt, avant de devenir une peau que je retirais à l’aide d’une pointe de compas avec une précision chirurgicale ?

Histoire des colles, vous disais-je !

JFP

http://booknode.com/chagrin_d_ecole_04920/extraits Des extraits croustillants de « chagrin d’école »

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