Destination : 4 , Je voudrais que quelqu'un m'attende quelque part.


« A toi qui ne m’attends pas »

La vieille dame écrit dans son cahier aux pages quadrillées bleu pervenche avec un crayon chapeauté d’une minuscule gomme blanche.

Elle invente un interlocuteur immobile dans un paysage aux couleurs chaudes.

Il lui sourit en agitant la main. Cela signifie « viens »

Du bout de son crayon la vieille dame à petits mots timides, empruntés, il faut comprendre il y a si longtemps qu’elle le rêve, approche.



Oui, c’est bien lui et son regard rieur, calme et bienveillant.



Elle tend la main. Le toucher juste du bout des doigts. Effleurer le dessin du nez, la courbe du menton.

Il a fermé les yeux, il connait l’importance du premier geste.



La vieille dame pense que la beauté est sereine.

Dans son cœur éclate un torrent. Tant d’espérance si longtemps emprisonnée.

Elle lui raconte avec une voix menue, presque éteinte, le cimetière de la solitude.



Elle a posé sa tête sur la poitrine de son aimé inconnu.

« Je n’ai plus peur. Tu es la fin de ma route. »



La vieille dame pose son crayon et referme son cahier.

Dans son dos deux chats sommeillent dans la lumière enjouée d’un matin printemps.

Une colombe s’est posée sur la rambarde du balcon.

Dehors des papillons se poursuivent au-dessus des pâquerettes et des pissenlits



« Il est temps d’y aller » pense la vieille dame.



Elle donne tout son temps et le reste de ses forces à un refuge pour animaux abandonnés.

Elle sourit. Comme ils l’espèrent, comme ils l’attendent ces orphelins à quatre pattes.



FIN



EVELYNE W