Destination : 347 , Guide du Voyageur pour Ailleurs


Il y a des choses que l’on rencontre plusieurs fois, vous savez ce que c’est. On a alors l’impression qu’il s’agit là d’un signe, qu’il faut en faire quelque chose.

Je ne me souviens plus quand pour la première fois je l’ai rencontrée. La deuxième fois, je m’en rappelle très bien, c’est moi qui l’ai faite revenir.

Nous étions dans une discussion, un débat, avec mes élèves.
Tout à coup, Henry*, le plus jeune, 12 ans, a pris la parole :
– Monsieur, pourquoi est-ce qu’on naît, qu’on grandit, qu’on mange, que des fois on se marie, puis qu’on vieillit et qu’on meure ?

Un beau silence s’est déployé dans la salle de cours, un silence épais et solide, bien campé sur ses pattes arrières. Je ne suis pas homme à être embarrassé par les questions, je crois même que j’aime les vraies questions, celles qui sont essentielles.

C’est là qu’elle est revenue, qu’elle s’est proposée comme éventuelle solution à la question que me posait Henry. Je pris le temps de joindre mes mains par le bout des doigts et pris ma voix de conteur :

« Je vais vous raconter une histoire de science-fiction. Dans un futur lointain, les hommes ont inventé un ordinateur dont la puissance dépasse tout ce que nous pouvons imaginer. Cette machine a réponse à toutes les questions, son intelligence est incroyablement développée. A vrai dire, ce ne sont pas les hommes qui ont inventé cet ordinateur, mais un autre ordinateur, presque aussi puissant.
Bref, un beau jour, les hommes, comme toi, Henry, posent LA question à l’ordinateur, celle sur le sens de la vie, quel est le sens de notre vie, notre présence sur terre, le pourquoi… L’ordinateur va mettre sept millions d’années pour répondre. Bon, ce n’est pas si grave, dans ce futur, les hommes sont presque immortels et le temps importe peu. Au bout de sept millions d’années, la réponse tombe, vous voulez connaître la réponse ? »
– OUI ! OUI ! Vocifèrent mes élèves qui craignent une supercherie ou un teasing abusif de ma part. Leurs yeux sont si ronds d’attente que je ne peux faire durer le suspens plus longtemps.
– La réponse est : « 42 ».
Un silence plus féroce, empreint de surprise et de stupeur a fait déguerpir le précédent.
– C’est n’importe quoi, ne peut s’empêcher de dire un Henry incrédule qui croit que je me suis joué de lui. Cependant, il attend que je m’explique.
– Non, l’ordinateur est formel, la réponse au sens de la vie est : 42. Ce que cette histoire nous dit, entre autres explications, c’est qu’il est bien possible que si une réponse à la question que tu as posée existe, nous ne soyons pas capables de la comprendre…
Je vous passe le reste de notre échange philosophique qui esquissa d’autres prolongements suite à cette petite histoire.

Pourtant féru de S-F depuis mon adolescence, je n’avais rencontré l’anecdote « 42 » que peu de temps auparavant, et depuis, je la rencontre régulièrement. L’histoire que j’ai racontée à Henry s’en inspire librement. Pas plus tard qu’hier, en lisant « l’anomalie » de Hervé Le Tellier, je l’ai à nouveau rencontrée : l’auteur la raconte à sa manière (plus fidèle) pour expliquer pourquoi un protocole de sécurité improbable porte le numéro 42.
L’histoire originale est tirée du Guide du voyageur galactique ou H2G2 (pour The Hitchhiker's Guide to the Galaxy). H2G2 pour les anglo-saxons amateurs de science-fiction est au départ une série radiophonique crée par Douglas Adams et diffusée sur la BBC entre 1978 et 1980. Ensuite, l’auteur en a fait une série de cinq romans. Plus tard une série TV a vu le jour, puis un film, etc.
Ce qui fait l’originalité d’H2G2 c’est le traitement humoristique d’une science-fiction qui ne cherche pas à être crédible. Il y a un indéniable côté « Monty Python ».
Extrait :
“Dans nombre des civilisations les plus décontractées sur la marge orientale de la galaxie, “Le Guide du voyageur galactique” a déjà supplanté la très imposante “Encyclopaedia galactica” comme dépositaire de toutes les sagesses et connaissances. Car, bien qu’il contienne de nombreuses omissions, plusieurs apocryphes et même des affirmations particulièrement fausses, il l’emporte sur son concurrent plus ancien et plus pédant sur deux points importants. D’abord, il est légèrement moins cher. Ensuite, la mention PAS DE PANIQUE est inscrite en larges lettres amicales sur sa couverture”

Bon, il faut que je retourne sur Terre et au présent pour vous esquisser un itinéraire qui ne soit ni « 42 », ni une blague !

Je vous propose maintenant plusieurs itinéraires :

- écrire un extrait de guide « dépaysant » sur un lieu particulier, connu, imaginaire. Les guides expliquent, illustrent, racontent… Si vous souhaitez partir pour pratiquer un tourisme très original, je ne saurais trop vous recommander d’aller sur la page « latourex.com » (laboratoire de tourisme expérimental), là :
http://latourex.org/latourex_fr_2019.html

- écrire un texte avec 42 comme nombre emblème. 42 peut-être un nombre particulièrement important dans l’histoire que vous raconterez, il peut revenir souvent, être anecdotique, la réponse à une autre grande question…

- Participer d’une manière ou d’une autre au culte H2G2.
Pour cela, plusieurs possibilités :
raconter un épisode (vrai ou non) de la série,
utiliser des ingrédients popularisés par Douglas Adams, par exemple « le jour de la serviette », l’ordinateur échiquéen « deep thought », le dernier restaurant avant la fin de l’univers.
Je ne saurais trop vous conseiller de visiter le site français qui m’a permis d’apprendre tout cela : http://voyageurgalactique.com/

Bon voyage !

Ah ! J’oubliais un itinéraire supplémentaire : écrire sur quelque chose ou quelqu’un qui revient un peu de manière inattendue et inexplicable, inexorablement. Le raconter ici, c’est peut-être sans débarrasser ?

JFP

Exceptionnel, ne mâchons pas nos mots : une adaptation radiophonique en français de l’original, gratuite, offerte par son créateur : http://voyageurgalactique.com/h2g2-le-guide-du-voyageur-galactique-serie-radio-en-francais/

* prénom changé pour une question d’anonymat

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