Destination : 28 , L'île d'Utopie


Animalis

Lassée de Paris, du stress et de la précipitation,

j’ai économisé pendant longtemps pour pouvoir m’offrir

un séjour de trois mois sur une île paradisiaque.



Après un voyage de 20 heures incluant un changement

d’avions et un périple en bateau, j’arrive à Animalis,

une île seulement habitée par des animaux. On a le

choix : ou l’on reste sur la partie « tranquille » ou

l’on monte sur le dos d’un éléphant et l’on s’enfonce

avec lui dans la brousse, avec tout ce que cela peut

comporter de dangers …



J’ai déjà choisi la première formule, et lorsque je

vois le pachyderme je lui fais comprendre que je n’ai

pas besoin de lui. Il me fait alors un petit signe

avec sa trompe et s’éloigne.



Je suis alors accueillie par deux singes qui

s’occupent de mes valises.



Ces singes dressés gèrent aussi l’intendance (j’ai

reçu une note explicative du Voyagiste) : ils

apportent l’eau et les provisions déposées sur une

plage deux fois par semaine par un capitaine de

bateau. Maria, l’une des guenons a pour tâche de faire

la cuisine : préparer les salades, cuire le riz ou les

pommes de terre et griller les poissons. C’est vrai le

service se révèle souvent imparfait mais les

intentions sont bonnes et j’aime bien lui donner un

coup de main !



Pour mon plus grand plaisir, des oiseaux multicolores

me réveillent le matin et avant le déjeuner je chante

avec eux. Des dauphins curieux, viennent régulièrement

non loin de la plage pour voir les occupants de l’île.



Ma maison est en réalité une grande hutte perchée sur

un arbre, meublée de quelques objets en osier. C‘est

Chita, l’autre guenon, qui fait le ménage en

perturbant souvent mes affaires de sorte que j’ai du

mal à les retrouver. Elle veut ainsi me faire

comprendre qu’ici on n’a pas besoin de grand chose et

qu’il faut perdre ses habitudes.



Je cueille quelques fois des fruits exotiques (mangues

ou petits bananes). Chita va aussi me chercher des

noix de coco qu’elle fait tomber à mes pieds.



Le farniente, la natation, la pêche aux coquillages

et l’écriture : voilà mon quotidien : c’est la belle

vie ! Je fais aussi des photos. Je me baigne dans une

mer si limpide que je peux en apercevoir le fond.

Quelques fois, je m’éloigne et m’approche avec

ravissement des coraux aux couleurs vives.



Le soir, assise et adossée à un arbre, j’observe la

vie des flammes du feu de bois. Souvent les guenons ne

me laissent pas à ma méditation, elles viennent me

taquiner et m’obligent à jouer avec elles.



Chaque soir vers 10 heures, un perroquet sur une

branche basse répète inlassablement : qu’est-ce que

t’a fait aujourd’hui ? qu’est-ce que t’a fait

aujourd’hui ? qu’est-ce que t’a fait aujourd’hui ?

Jusqu’à ce que je réponde puis il dit avec la même

assiduité : qu’est-ce que t’as découvert ? qu’est-ce

que t’as découvert ? qu’est-ce que t’as découvert ?

Cela me permet de résumer ma journée sur un carnet.



J’ai fait la connaissance de Dolphin. Nous avons

rapidement sympathisé. Nous jouons ensemble, il est

très habile à m’imiter dans l’eau.. Nous communiquons

par télépathie en nous transmettant des images.

Lorsque je reste un peu trop dans l’eau, il me le fait

savoir. Des fois, il me permet de monter sur son dos

et m’entraîne avec lui au large. C’est une relation

fabuleuse : il est toujours de bonne humeur et rit de

bon cœur.



Les jours s’écoulent ainsi doucement avec comme seuls

repères chronologiques le lever et le coucher du

soleil.



Un matin, mon portable muet jusqu’à présent, se met à

chanter : l’on va venir me chercher, je dois me

préparer. Avec tristesse, je rassemble mes affaires,

les singes portent mes bagages. Dolphin vient me

saluer une dernière fois avec sa nageoire. Les oiseaux

se réunissent en cercle autour de moi pour m’empêcher

de bouger ; je leur explique que je dois partir mais

que je reviendrai certainement. Je quitte avec regret

cette île magique avec maintenant comme butin : des

valises remplies de coquillages et 3 cahiers couverts

de textes divers et de notes.



Christelle