Destination : 87 , Vous !


Mais qui est-ce ?

Son sourire m’est familier.
- Salut comment ça va ? me lance t-elle du trottoir d’en face quand je m’apprête à traverser et à arriver droit sur elle
- Salut, répondis-je assez fort
- Mais qui est-ce maman ? murmure ma fille en me donnant la main pour traverser.
- …
- Maman, c’est qui ?
- Je ne sais plus. Dépêche toi, nous allons être en retard à l’école.
Vous arrive-t-il de rencontrer quelqu’un dont le visage vous est familier mais que vous n’arrivez pas à situer ? Vous voyez ce visage et vous vous dites,
« oui, je la connais !
Mais d’où ? ».
Vous creusez votre cervelle endormie pour cause de panne de café et vous énumérez.
Boulot ? Ecole ? Supermarché ?
Ecole ! J’en mettrais ma main à couper.
- Alors, votre fille va à l’école ici, aussi ? Demande-t-elle maintenant face à moi.
- Oui !! répondis-je avec un grand sourire.
Si ce n’est pas l’école, ce doit être le centre aéré.
- Ah ben ça tombe bien, Vous ne savez pas mais j’ai Armelle en photos ! Elle était au centre aéré au mois d’août ? Je ne savais pas ! Je pourrai vous les montrer, j’ai acheté toutes les photos du centre sur cd-rom. Vous avez un lecteur de cd-rom ?
- Ah oui ? Ben oui, elle y était aussi. Continuais-je décontenancée

Vous arrive-t-il parfois de chercher pendant que vous discutez avec la personne devant vous ? De vous dire :
« Mais oui, je la connais, je suis sure, je vais trouver ». Que faîtes-vous dans ce cas ? Parfois, il suffit d’une fraction de seconde. Parfois, vous osez un « d’où est ce qu’on se connaît ? » ; parfois, la personne parait si familière qu’il serait déplacé de lui demander. Crainte de condamnation d’arrogance ou d’Alzheimer avancé. D’ailleurs, j’ai un problème de mémoire. Pas vous ?
Faisons un test. Pensez à chercher un timbre dans votre portefeuille qui se trouve sur la table de la cuisine. Allez dans la cuisine. Au passage, ramassez le verre que votre chérubin a laissé traîner. Mettez-le dans l’évier. Le verre, bien sur. Peut-être allez-vous le laver tout de suite ou le laisser. Faîtes vous plaisir, prenez un petit bout de chocolat dans le placard ou une pomme verte bien croquante. Au fait, que faudra-t-il pour le goûter du chérubin demain ? Fruit ou laitage ? Vous regardez le programme de la semaine. Le mardi, c’est laitage. OK. Vous n’avez pas d’enfant ? Peu importe ! Vous avez le chocolat. Vous revenez à votre bureau avec deux carrés. Une enveloppe vous y attend.
Bien sur, vous repartez. Mais bon, nous nous égarons.
Revenons à mes moutons. Aidez moi, s’il vous plait.
Car pendant que vous cherchez, tout comme moi, persuadée de trouver, la conversation avance. Elle me parle maintenant de sa fille qui entre en Maternelle. Lorianne, vous vous rappelez ? Espérons que ça va bien se passer !
Opinez de la tête.
Que la maîtresse saura faire.
Opinez de la tête.
Elle a Madame Finch pour cette première année, vous connaissez ?
Négation de la tête.
Il paraît qu’elle est bien. C’est la directrice de l’établissement également. Il paraît que l’école est assez bien aussi.
Comment couper cette lancée et demander « mais au fait ? ». Vous avez raison, elle est peut-être cliente du salon de coiffure. Essayons une ruse facile.
- Oui, l’école est bien, et elle est juste à coté de chez moi et du salon. Quand les fenêtres sont ouvertes, j’entends les enfants à la récréation.
- Ah bon, votre salon est à coté ?
- Là, rue Henri Bergson.
- Vous travaillez dans un salon de thé ?
Là, je suis désespérée. Pas vous ?
Plus le temps de tergiverser, la cloche sonne.
- Au revoir euhhh…je ne me souviens plus de votre nom, criais-je sur ma lancée
- Sabine ! Au revoir, à la prochaine, proclame-t-elle en agitant sa main droite
- Maman, c’était qui ?
- Sabine, ma chérie.

cathy-laure