Destination : 379 , Montagnes
Pyrénées
D’Atlantique en Méditerranée,
Les pieds dans l’eau ; la tête dans le ciel,
Tu dresses ta ligne de crêtes,
Ta fière ligne de sommets,
Du Vignemale au Canigou,
De l’Aneto à la Maladeta,
En passant par le Néouvielle ou le Taillon,
Depuis toujours, tu dessines mon horizon.
Au lever du jour,
Tu t’habilles de lumière, d’or pâle et de rosée ;
De parfums subtils et légers,
De mousse verte et de fleurs des prés.
Quand vient midi,
Tu t’étires sous le soleil, de bronze et de torpeur ;
De bourdonnements et crissement d’insectes
Et de cris des rapaces, et des chants d’oiseaux.
Quand tombe le soir,
Tu deviens flamboyante, de cuivre et de fougère,
De vie sauvage qui s’éveille et s’épanouit
Quand les hommes se retirent.
Quand vient la nuit
Sous la lune, d’argent et de mystères,
Vient le temps des histoires, des contes, des légendes
Que le vent murmure aux oreilles des enfants.
Tu hérites d’une histoire millénaire,
A la fois si jeune et tellement vieille,
Tu portes en toi tant de paradoxes,
Force et de fragilité, vibrante et passionnée,
Tu es comme l’eau, changeante et mouvante,
Dangereuse ou accueillante,
Tantôt de feu, tantôt de glace,
Mais tu restes, depuis toujours, mon axe de raison.
Tu t’endors sous la neige,
Dans la morsure de l’hiver,
Tu offres tes flancs cotonneux
Aux amoureux de la glisse et des pentes vertigineuses.
Tu te réveilles au printemps,
Dans le bruit de l’eau des torrents,
Qui ruissellent en cascades,
Roulant et chahutant des galets jusqu’aux gaves.
Tu t’aiguises à la chaleur de l’été,
Dans la fraicheur de tes vallées,
Quand tes prairies se colorent de mille fleurs,
Et que paissent vaches et moutons, et courent les marmottes.
Tu t’abandonnes à l’automne,
Dans les brumes froides d’octobre,
Tandis que le vent souffle sa chanson,
Et que brûlent les feux dans toutes les cheminées.
Je voudrais parler de tes villages
Et de tes sites admirables,
Mais comment faire, il y en a tant ?
Le Mont Perdu, la Brèche de Roland,
Le cirque de Gavarnie, Le Pic du Midi,
Saint-Jean-Pied-de-Port, Cauterets, Bagnères, Collioure,
Tes glaciers, tes cascades, des gaves et tes torrents
Ton eau, toujours, nous offre ses déclinaisons.
Tu en as vu passer, des hommes,
Depuis Néanderthal et jusqu’à l’homme spatial,
Qui du pic du midi observe les étoiles.
Tu as croisé les armes, entre des peuples pourtant frères,
De Béarn en Catalogne, du Pays Basque en Andorre.
Tu as vu des croisades, des guerres et des combats,
Des réfugiés te traverser, au nom de la liberté,
Bravant ton hiver, ta puissance, ta férocité
Pour un monde meilleur ou juste pour s’enfuir.
Quand résonne en cœur tes chœurs d’hommes et de femmes,
Quand « Se Canto » vole, de montagne en montagne,
Le temps semble s’arrêter, il ne reste qu’à écouter,
Et parfois, percevoir, comme dans un écho,
Ta voix, grave et caverneuse, pleine de vibratos,
Qui se propage en onde magnétique,
Telle une formidable avalanche
Des hauts sommets jusqu’aux profondes vallées.
Tu sembles faite de pierres et d’éternité
De voies hasardeuses et de chemins secrets ;
D’une croix ou d’un cairn au détour d’un sentier
De ces hommes patients qui lentement t’apprivoisent,
Dans des chalets de bois et de toits d’ardoise,
D’une vie simple, rude et sauvage
D’un hier éclatant, d’un demain davantage,
Et toujours, ton profil, sera mon arrimage.