Destination : 28 , L'île d'Utopie
Une île au large de l'amour
Les îles Aléoutiennes,
tradition très ancienne,
sont, le plus gros de l'année, quasi sahariennes :
un désert ! C'est l'été qu'y viennent
les aoûtiennes,
d'où leur nomen :
allez, aoûtiennes !
Pourquoi aoûtiennes
et non aoûtiens ?
Seuls les femelles specimens
vivent dans cet Eden.
Nul mâle aoûtien
ne s'y démène :
c'est une île au féminin.
Ainsi en décida Pwarbélélèn,
de ces lieux la souveraine,
ex MLFenne..
Oh pour la faune il y a de tout !
des aoûtats et des tatous,
des toutous,
des matous
qui font miaou
dès la mi-août
et causent foot,
pas prout-prout,
tandis que broutent
sous les yourtes
quelques gnous
aux genoux
couverts de croûtes.
Des marabouts
mangent des tourtes
au yaourt
et sirotent du vermouth
sous des voûtes
en tibias de mammouth...
Oh pour l'espèce animale
rien ne manque : pas une queue,
pas une corne, pas une trompe :
qu'aucune lacune ne rompe
la divine harmonie des couples que
Noé mit en son arche minimale.
Mais pour les mâles
humains,
rien !
Pas le moindre petit bout
de mâle aléoutien !
Rien
à se mettre sous la main...
Et chaque aléoutienne
de rêver d'aléoutien.
Chacune voudrait bien
aller au sien.
Oui, mais où aller ?
Oui, aller où ?
Se fier aux alizés,
aux courants giratoires,
c'est aléatoire,
c'est aller trop tard,
peut-être, qui sait ?
Et puis, mettre à la voile ?
Sur l'île, pas de gasoil...
Suivre la bonne étoile ?
Oui, mais laquelle ?
Au hasard,
ou celle
qui guida Gaspard,
Melchior et Balthazar
jusque vers la crèche
où gazouillait le petit Jésus ?
" Oui, j'ai su, j'ai su,
hullula revêche
une grande pimbêche,
la prêtresse Kiprêche :
j'ai su où les mâles crèchent !
aux Mâledives !"
Les îles Maldives
sont des terres maladives
où les mâles salivent
sur des divans
devant des vamps fictives
sur le petit écran
en se vantant
tout le temps
de leurs exploits d'antan,
de leurs exploits d'avant...
Avant quoi ? Avant le Sport,
pardi ! L'ascétique Sport,
qui torture leur corps
et leur cerveau, essore
leurs muscles, tord
leurs membres sans ressort,
le Sport,
que révèrent, grands pontifes,
les Entraîneurs Sportifs,
dieu jaloux, dieu oppressif...!
Pauvres mâles régressifs!...
" Stop ! Cessons d'être passifs,
dit enfin un des maladifs plaintifs :
nous sommes beaux et forts,
faisons un effort !
Trouvons-nous des femmes,
partons à la conquête
de ces dames !"
Et les voilà partis, en quête
d'un Sésame :
car où trouver des Maldivettes ?
Le Sésame se présenta, miracle,
sous la forme d'un oracle
enfermé dans son habitacle
de verre : une bouteille
à la mer ! O merveille !
O la dive bouteille !
Une Aléoutienne, vieille
belle, y déclarait sa flamme
sous forme d'épithalame
à un Adonis virtuel
qui n'avait cure d'elle.
"Une Aléoutienne
esseulée ? Qu'à cela ne tienne !
Me voici ! Je suis Etienne !
Qu'aucun obstacle
ne me retienne !"
Et voici qu'à sa suite
mille bouteillesques invites
vinrent tenter les Maldivites...
Faut-il vous raconter la suite ?
Les bouteilles
trouvèrent leurs bouchons,
les bouchons
leurs bouteilles,
et tout fut pour le mieux dans le meilleur des mondes...