Destination : 7 , Objet banal mais capital.
Le short
Le short
Il n’aurait jamais dû mettre ce short! La menace est si proche, maintenant. C’est sa mère qui a insisté
- « On est en juin, bon sang, met un short! »- et par paresse , et aussi pour lui faire plaisir, il a cédé. Il est pas mal, ce short, c’est lui qui l’a choisi. Il est bien jusqu’aux genoux, il cache la maigreur. Mais au-dessous, il y a ces jambes longues et poilues. Il s’en veut tellement!
Le danger est derrière lui; il l’entend approcher. Maudite timidité, maudit short! Il empoche la monnaie.
- « Tu n’as pas vérifié? Il manque 1 euro… »-Il n’a pas le temps de mettre au point une tactique de repli, que surgissent cinq ou six filles, bruyantes, parfumées, lumineuses.
Son estomac s’essore comme une serpillère, son cœur s’arrête tout bonnement. De la buée s’est formée sur ses lunettes.
Il fonce dans le tas.
Une voix l’interpelle: « Hé! »
Mais il est sourd.
« Tenez, vous avez fait tomber 1 euro. »
Elle est à ses pieds, et lorsqu’elle se relève, il croise ses yeux, qu’elle a encore mouillés d’avoir ri, et tout étoilés de doré.
Il ne sait pas qu’il dit merci, et s’enfuit plus qu’il ne sort.
La place inondée de soleil, les pigeons, les piétons. Ses oreilles bourdonnent. La fraîcheur de l’étroite rue de la maison l’apaise. Un long soupir retenu dégonfle sa poitrine. Maman, qui l’attend en fumant.
Bon sang, les yeux de cette fille!
Jamais, jamais plus, il ne mettra ce short.