Destination : 18 , Détournements majeurs.
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Extrait des minutes du procès opposant le Ministère Public à
Messieurs Nains Prof, Dormeur, Atchoum, Simplet, Timide, Grincheux et
Joyeux, tenu en ce jour de l'an 1523, salle des Audiences du Château
de Sieur Charmant, Comté de Margolide, Penrbith.
Lecture de l'acte d'accusation faite par l'honorable Juge Godefray :
" Nous, Ministère Public, saisis par le Sieur Charmant Prince,
demandons la condamnation des Sieurs Nains pour séquestration,
esclavagisme, tentative de meurtre par empoisonnement à l'encontre de
Damoiselle Neige Blanche ci-présente. Demandons en outre
l'application des circonstances aggravantes pour accusation
calomnieuse ayant entraîné la mort de Dame Mère Belle, ci-absente
pour cause de décès. Pour corroborer nos dires nous appelons à la
barre notre premier témoin, Sieur Borgan, Shériff du Comté"
Déposition du Shériff du Comté:
" Mes hommes et moi avons été appelés en intervention par Sieur
Charmant, au coeur de la forêt de Margolide, le troisième jour de
printemps de l'an 1522. A notre arrivée, étaient présents sur les
lieux Sieur Charmant, Sieurs Nains et Dame Neige. Cette dernière
gisait dans un coffre de verre scellé, au milieu de la clairière,
présentant tous les signes d'un passage à trépas. Bienheureusement,
nous avons pu briser la vitre blindée qui lui tenait lieu de cercueil
et pratiquer sur la victime un bouche-à-bouche aussi agréable que
salvateur. Tandis que nous nous affairions avec diligence à réanimer
la pauvre victime, Sieur Charmant tenait valeureusement en joue la
famille Nains ci-présente. Ces derniers simulaient un désespoir
infini, mais il n'a pas échappé à ma sagacité de vieux limier que nos
massages cardiaques appuyés et nos insufflations buccales n'avaient
pas l'air ni l'heur de leur plaire outre mesure. Ils eurent beau jeu
de feindre l'allégresse au réveil de Damoiselle Neige, on ne la fait
pas à un vieux briscard comme moi. Sitôt la victime évacuée par le
Service d'Aide aux Ménagères Utiles requis sur les lieux, j'entrepris
l'interrogatoire des sept inculpés. Pour tout dire des six, car l'une
de ces fripouilles est affligé d'un mutisme total. Les gredins ont
commencé par accuser la défunte épouse de notre bon roi, comme quoi
celle-ci n'aurait pas supporté la beauté et la grâce de Damoiselle
Neige. Il est bien évident que pas un instant nous n'avons cru à ces
balivernes. Pensez donc, miroir magique, pommes ensorcelées, potions
à base de crapauds ... Je vous demande un peu ... Toujours est-il que
j'ai mandé l'un de mes hommes sur le chemin de la mine pour attester
de la fausseté de leurs assertions fantaisistes. Si effectivement, le
lieutenant Robach a bien trouver Madame Mère Belle au bas de la
falaise, il fut de suite évident pour nous que seuls ces forbans
avaient pu la pousser du haut du rocher, vers son destin funeste.
Il ne nous en fallut pas plus pour embarquer tout ce àproprement
parler petit monde vers les geoles du palais royal. Nous avons
ensuite procédé au placardage d'appels à témoins sur les arbres de la
forêt, pour étayer ce que nous pressentions être une des plus grosses
affaires criminelles qu'ait connu le comté d'ordinaire si
paisible.Bien nous en prit.
La colle des affiches n'était pas encore sèche que se présentait à
nous une pauvre vieille, marchande de pommes de son état, qui vint
nous conter l'état d'esclavage dans lequel elle avait trouvé la
pauvre damoiselle Neige, alors qu'elle vaquait à son petit commerce
dans les bois. La pauvre fille était contrainte de briquer le logis-
mais peut-on vraiment parler de logis? - le taudis plutôt des
accusés. Des immondices répugnants jonchaient le sol de la masure.
Les araignées avaient envahi toutes les encoignures de la baraque de
bois. Le linge sale s'amoncelait partout. Et l'odeur! La bonne
vieille nous avoua même avoir cru un instant que son nez, qu'elle a
long et crochu, se gâtait, tant la pestilence était insupportable.
Par la fenêtre de la masure, la marchande de pommes a vu de ses yeux
la pauvresse en train de tenter de remettre un peu d'ordre dans ce
capharnaum, empêchée dans ses gestes par toute la vermine qui
grouillait là. Imaginez un peu : des lapins, des oiseaux, des rats,
des souris, même des biches! je dis bien des biches, messieurs! tout
ce bestiaire dans la cabane, et la pauvre Dame Neige, les yeux rougis
par la poussière, les mains gercées par l'eau de vaisselle, le front
trempé de sueur. Selon le témoin, le spectacle était affligeant et
elle en fut émue, au point d'offrir gentiment une pomme à la
malheureuse. Après bien des tergiversations, elle l'accepta, mais
savez-vous ce qu'elle comptait en faire ? Un gâteau pour ses
bourreaux! Oui, messieurs! Preuve flagrante que l'état d'esclavage
auquel elle était réduite avait annihilé toute sa volonté. Une
esclave soumise, voilà ce qu'elle était!
Vous croyez avoir entendu le pire ? Nous aussi nous le pensions,
jusqu'à ce que se présente à nous un nouveau témoin dont les dires
nous ont fait progresser plus avant encore dans l'horreur et
l'abomination. A peine la vieille avait-elle quitté nos locaux que se
présenta à nous Sieur Chasseur. Ce dernier, citoyen respectable, nous
fit le récit de ce dont il fut témoin une nuit qu'il chassait le
sanglier à proximité du domicile des gredins ci-présents.
Afin de ne point choquer l'assistance, je ne m'étendrai pas en détail
sur la scène qui se déroula sous ses yeux, mais sachez qu'il vit Dame
Neige contrainte de danser pour ces canailles. Eux jouaient de la
musique, riaient, tandis que la victime tournoyait, obligée qu'elle
était de soulever un pan de sa jupe d'une manière que Sieur Chasseur
ne put s'empêcher de trouver indécente. Plaît-il, Monsieur le Juge ?
Ah, non, pas nue! Mais pas loin, tout juste vêtue d'une robe jaune et
bleue, d'une cape rouge et d'un ruban rouge! Rien de plus!
D'une affaire d'esclavage moderne, nous passions à un cas aggravé
d'esclavage sexuel. Si nous avions encore quelques doutes, la saisie
des cassettes vidéo sur les lieux du crime les effaça définitivement.
On y voit que ces soirées dansantes, ces parties fines devrais-je
dire, s'y répétaient quasiment tous les soirs. Une honte !!!
Voilà ce que nous ont appris les témoins."
" En conséquence, Nous,Ministère public, prions la Cour de réserver
la pire des peines à ces pervers libidineux, qui masquent leurs
tristes penchants sous des airs bonhommes.
Il me semble toutefois nécessaire, avant que de rendre mon verdict,
de procéder à huis clos, décence oblige, à une reconstitution de la
scène de réanimation dans la forêt. Dame Neige, si vous voulez bien
me suivre ...