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le vide et le rien

Dans mon traitement de texte, j'ouvre un nouveau document, aucun caractère ne vient le remplir tant que je ne les ai pas fait surgir du clavier, il est vide, il n'existe pas encore dans la réalité, angoisse de la page blanche électronique. Tiens, si je le veux, je ne l'enregistre pas et il retourne dans le néant. Désintégré avant d'avoir vécu. Il a quand même mobilisé un flux d'électrons, laissé une trace invisible, avant de sombrer dans la non existence. De tout cela ne
résulte rien. Rien plutôt que quelque chose de concret, de palpable, une feuille de papier couverte de caractères signifiants.
Peu de temps après, j'en créée un second, en commençant à remplir le vide de la nouvelle page, par le récit de la disparition de ma créature électronique.

Qu'y a t'il entre ces guillemets? Tout d'abord ça m'intrigue. Je découvre un petit univers vide borné par deux caractères. Un espace transparent rempli de rien et qui peut rester tel, pourquoi pas. Au contraire, en regardant autrement, je perçois un espace infini, où peuvent naître tous les questionnements, tous les possibles. Le vide appelle l'imagination, il aspire à être rempli. Ne dit-on pas que la nature a horreur du vide?
Le vide vous aspire aussi comme un puits sans fond, vertigineux. J'en ai fait l'expérience douloureuse, dans le regard fixe et vide d'un petit enfant autiste, enfermé, replié dans son monde. Impossible de communiquer, de tisser des liens, même ténus. Il ne faudrait peut être que trois fois rien, pas grand chose donc, mais quelque chose quand même. Je suis bouleversée par la souffrance cachée derrière ce petit
visage fermé que rien n'atteint . Je ressent un grand vide au creux de l'estomac et l'angoisse m'étreint en pensant au difficile avenir de cet enfant et de ses parents.

Nous sommes tous sur un vaisseau intersidéral, la Terre, Gaia chez les Grecs, qui fonce dans l'univers, tout en tournant autour du soleil. Après les couches atmosphériques qui entourent notre planète, c'est le vide, où rien de vivant ne peut survivre.
C'est l'été, je suis allongée sur le sol, immobile, sous la voûte étoilée, au clair de lune. Je suis émerveillée par le spectacle de la
voie lactée et des étoiles. Et dire que l'essentiel de l'univers c'est
du vide, encore que des scientifiques pensent que le vide n'est pas si vide que ça. Il y aurait de la matière manquante prévue par les calculs!
Je suis calme, sereine, bercée par le chant des grillons. Je me sens aspirée par le ciel. Je m'envole dans le vide, vers la lune et les étoiles, Sirius la plus brillante, Aldébaran la rouge, les galaxies,les planètes. Comme c'est facile et fascinant!
Le chant strident des grillons et les bruits ambiants me réveillent soudain. Quel rêve merveilleux!
Après ce voyage rêvé je me repose toujours la même question:
"Pourquoi quelque chose plutôt que rien?"
"Qu'y avait-il avant le Big-Bang, du vide?
Mystère!...

kanga