Destination : 141 , Hopper avant l'arrière saison


HOPPER ET HOMERE

PREAMBULE :

Je dédie ce poème à Edward Hopper, dont le tableau « Light house hill » m'a inspiré. (suivre le lien)

http://www.abstract-art.com/abstraction/l2_Grnfthrs_fldr/g0000_gr_inf_images/g031c_hopper_lighthousehill.jpg

Mes remerciements (et mes excuses) vont d’abord à Homère, sans qui rien n’eût été possible, et aussi à Georges Brassens, Joachim Du Bellay et Zorro.

Mais foin des mondanités ! Voici mon bla-bla phare : en vers et contre toux !

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HOPPER ET HOMERE



Curieuse cette toil’ d’Hopper :

On voit le ciel et le soleil

Mais on y cherche en vain la mer…

Bizarre ce phare qui veille

Sur une colline trop lisse…

Ainsi pensait le brave Ulysse

Car il avait trop lu Homère

Et choppé une forte toux

C’est fréquent quand on quitte tout.



En ce petit matin blafard

Porté par la brise câline

Il avait aperçu le phare

Comme posé sur la colline…

Et puis plus loin cette maison

Une belle bâtisse en T

Qui après toutes ces saisons

Paraissait aujourd’hui hantée.

Le vent qui soufflait en lapant

L’eau de la mare aux nénuphars

Jouait de la flûte de Pan

Avec la lampe en haut du phare.



Toute la nuit bravant la houle

Redoutant que son bateau coule

Il avait suivi la lumière :

Quatre éclairs brefs et un coup long

Venant de façon régulière

Le guider sur la mer sans fond ;

Les embruns de la mer moussaient

Et lui, tristement, il toussait.



Il n’avait pas analysé

Les raisons qui le rendaient las

Et poussé par les alizés

Il revenait, il était là

Tout en bas, au pied de ce phare…

Et tout d’un coup il était pris

Par cette sorte de cafard

Qu’éprouvent les hommes épris

Quand ils devinent que leur belle

N’a pas la foi du charbonnier

Et qu’elle est partie faire la belle

Avec le fils du cordonnier.



Le rivage soudainement

Paraissait inhospitalier

Et pour monter c’est vainement

Qu’il recherchait un escalier…

Et l’Ulysse de pacotille

Se mit brusquement à pleurer

En descendant de sa flottille :

Son amante l’avait leurré

C’était sûr… La chance était mince

De retrouver sa Pénélope

Qui comme le disait Brassens

Etait une fieffée salope.



Alors le doute s’instilla :

Allant de Charybde en Silla

Il avait fait un beau voyage

Il avait conquis la Toison

Mais pour le reste de son âge

Il ne verrait plus sa maison…

En ayant regardé partout

Il fut pris d’une forte toux…



Car près de la mer argentée

Sombres héros en sombrero

Des argentins désargentés

Boule à zéro comme Zorro

L’attendaient, l’œil patibulaire.

Ils sortirent leurs armes et tirèrent

Et soudain les vents redoublèrent

Et puis les eaux se retirèrent…

Tout était redevenu lisse

Et c’en était fini d’Ulysse…



Fin d’Odysée. Dans le hublot

D’Homère

Il ne reste que le tableau

D’Hopper.

Michel Ray