Destination : 181 , Quatre mensonges et une vérité


Quatre vrais mensonges

Je m'en vais vous écrire quatre vrais mensonges qui pourraient bien, à eux quatre former une vérité, puisqu'ils sont vraiment faux. C'est déjà ça...



Mon premier mensonge est un rêve que j'ai fait pas plus tard que la semaine dernière. Comme quoi un mensonge peut être vraiment songe. Croyez-moi si vous le voulez, mais j'ai rêvé... que je dormais. Rien de grave, direz-vous. Erreur! Au réveil, une question lancinante m'assaille illico et m'inflige une torture quasi-métaphysique. En fait, elle me donne surtout l'envie de prendre d'urgence un aspirine pour remplacer mon petit café noir habituel de démarrage matinal : si me sens si reposé c'est que j'ai bien dormi, et si j'ai bien dormi, je ne l'ai pourtant pas rêvé ! Alors, où est passé mon mensonge ?



Mon deuxième mensonge est un rêve que j'ai fait la nuit suivante. Cette fois-là, j'ai rêvé que je ne dormais pas. Evidemment, c'est très frustrant, car au réveil, on est en pleine forme pour ressentir profondément l'épuisement d'une nuit blanche ! Soit dit en passant, la nuit blanche est à elle seule un mensonge puisqu'il y fait aussi noir que lors des autres nuits. Mais, je m'égare... J'avais vraiment dormi, mais mon rêve, lui, m'avait menti. Pour de vrai. Si vous avez du mal à suivre, l'aspirine est dans l'armoire à pharmacie, au dessus du lavabo, sur la droite.



Mon troisième mensonge est une nuit de rêve ! Avec Quelqu'une (j'ai mis un « Q » majuscule parce que c'est son prénom, vrai de vrai)... La langue française est un terreau où poussent les paradoxes. Notamment celui-ci : une nuit de rêve, normalement, c'est une nuit de fête amoureuse et charnelle qui ne laisse en principe, lorsqu'elle est bien menée, pas de place au sommeil. Pourtant, on l'appelle nuit de rêve alors qu'en fait, on ne dort pas. Donc pas de sommeil, pas de rêve. J'en entends qui chipotent : « Oui, mais le rêve, c'est la Quelqu'une... » Qu'en savez-vous, d'abord ? Vous ne la connaissez même pas ! Et en plus, elle n'est pas un rêve, elle est belle (c'est exprès) et bien là. Heureusement. Elle est infiniment mieux qu'un rêve, elle est vraie ! J'ai donc réussi l'exploit de passer une nuit de rêve sans dormir avec quelqu'un de bien réel. En chair et en noces ! Si, si, il doit en rester un peu dans l'armoire à pharmacie...



Mon quatrième mensonge est un rêve d'enfant, dans lequel je me racontais – c'était la fin des années cinquante – que j'étais un astronaute. Si vous saviez combien de galaxies j'ai arpenté, combien de planètes, de mondes étranges, parfois peuplés d'extra-terrestres. Eh bien je peux témoigner d'une chose : tous les Martiens, Vénusiens, Jupitériens et autres « Aliens » de tout poil parlent parfaitement le Français. Je le sais : dans mon rêve, il n'y avait pas de sous-titres ! C'est bien la preuve, non ?

Jérôme Daquin