Destination : 198 , L'art et la manière
dest. 198 : L'art et la manière - Eloge d'une tache sur un mur
L'art et la manière
Éloge d'une tache sur un mur.
J'aime me noyer dans les peintures de Brueghel.
Je resterais des heures en apnée. Scrutant les mimiques, les postures de ses petits personnages, examinant à la loupe les détails d'un rideau ou de la vaisselle.
J'aime, j'admire et je suis fascinée par ces journaux intimes de la vie quotidienne.
J'aime me laisser emporter par les charmes et la volupté mystique d'une madone tableaux de Van Dijck.
J'aime me perdre dans les cadres et perspectives du triptyque de Roger van der Weyden.
Je fonds pour cet instantané sublime de la « Jeune fille à la perle » d'un Vermeer amoureux.
Je ne trouve toujours pas les mots pour décrire mon émotion lors de la découverte de la « Ginevra Benci »...
Chez ces artistes du passé, j'admire sans relâche,cette volonté, cette quête, sans relâche, pour rendre la moire d'une soie, la légèreté d'une dentelle, la transparence d'un voile.
Cet acharnement à traduire la force, la faiblesse, le mouvement d'un coup de piceau.
J'aime, tour à tour, m'approcher et m'éloigner pour capter un regard et deviner une pensée.
J'aime, et je l'avoue sans honte, les peintres « photographes ». Ceux qui ont passé leur vie à saisir un instant de vie. Qu'elle soit modeste ou fastueuse.
Ils ont cherché la lumière… la lumière des lieux, la lumière pour eux, la lumière pour la postérité.
De tableaux en tableaux, la photographie s'estompa, cédant la place aux impressions.
De tableaux en tableaux, le paysage s'est invité et la lumière devint maîtresse.
Ils se sont appelé Impressionnistes, Dadaïste, Pointillistes, Fauvistes …
Ils ont joué avec la palette des couleurs, les écrasant, les étalant à coup de pouce, de brosse ou de couteau.
Ils sont allés dans le Sud, à la recherche des lignes pures, d'ombres sauvages et de couleurs crues.
Ils avaient une toute autre histoire à nous raconter, à nous laisser nous raconter.
D'autres ont sublimé le blanc, le bleu, le rouge, le noir.
Certains ont sublimé le carré et le rond , le point et la ligne.
On s'exclame de « oh » approbateurs, on s'exclame de « oh » épouvantés….
Je ne sais que penser.
Je sais combien il est difficile d'épurer à l'extrême sans tomber dans la caricature.
Je sais combien est long le parcours de la main de l'enfant à celle de l'artiste.
Aujourd'hui, je me laisse bercer d'une toile à l'autre ; celle où je regarde, l'autre où j'interprète…
L'art et la manière ou la manière et l'art.
© Danielle
