Destination : 174 , Ailleurs fait son cinéma
Los tres Mundos de La Havana
La Havane, Cuba, Printemps 2012.
Au cours d’une nuit ordinaire, le spectateur va découvrir les trois mondes qui animent la ville.
Le fil conducteur de l’histoire est porté par Lucia, une jeune fille de dix-sept ans issue d’une famille très modeste. La journée, elle travaille comme femme de ménage dans une grande résidence de style colonial, située dans les beaux quartiers de la ville. Le soir, elle danse dans un restaurant en face du Grand Théâtre, pour les touristes friands d’atraccionnes típicas.
Une nuit, alors qu’elle rentre chez elle, elle est accostée par Thomas, étudiant français d’une vingtaine d’années, idéaliste convaincu de la justesse de la politique sociale de Castro, « le seul à avoir su résister à l’impérialisme américain ! ». D’abord stupéfaite par son audace, Lucia devient vite furieuse en entendant les propos du jeune homme, convaincu d’avoir raison. Elle décide alors de lui prouver qu’il se trompe, et que son pays est loin d’être le paradis qu’il imagine.
S’ensuit une nuit virevoltante, rythmée comme une salsa, au cours de laquelle la jeune fille entraîne Thomas dans une découverte de la ville, passant des quartiers les plus pauvres dans lesquels elle vit avec sa famille aux quartiers les plus riches où elle travaille. De la place de la Révolution jusqu’au Malecón qui longe l’océan, en passant par le cœur historique de la Habana Vieja, ils traversent la nuit. Au cours de leur périple, ils rencontrent plusieurs personnages qui vont, chacun à leur tour, partager avec eux leur propre vision de l’île. Entre l’amour et la haine, la fascination ou le dégoût, mais avec toujours ce même attachement pour leurs racines : « Nada mejor que volver a casa … ».
Il y a Ana, la abuelita, qui vit dans le même immeuble que Lucia et sa famille. Son mari a été arrêté dans les années quatre-vingt et emmené comme prisonnier politique. Il est mort dans sa cellule après huit ans de détention et Ana n’a jamais été autorisée à récupérer son corps. Persuadée qu’il est toujours vivant, elle vit dans l’attente folle et désespérée de son retour…
Il y a Joaquim, le fils cadet d’Ana, qui a monté une équipe de base-ball pour les enfants de son quartier et accompagne Lucia dans les bars. Il refuse de rejoindre ses trois frères ainés aux Etats-Unis pour ne pas laisser leur mère toute seule, et passe ses nuits dans les bras de riches touristes occidentales, tout en buvant des Cuba Libre …
Il y a Ruben, le père de Lucia, qui a combattu aux côtés d’Ernesto Guevara, El Comandante, pendant la révolution et qui s’accroche obstinément à ses idéaux sociaux, tout en regrettant de ne pas avoir les moyens d’envoyer sa fille chercher du travail à l’étranger…
Il y a Enrique, le patron de Lucia, un hombre secreto, qui va sortir de sa réserve et leur offrir une visite exceptionnelle de sa demeure, l’une des plus anciennes de la ville, dont la construction remonte au XVIIème siècle, et qui va leur permettre de découvrir toute l’histoire de l’île, depuis l’arrivée des premiers colons espagnols, en passant par la plus sombre période de l’esclavage et du piratage, jusqu’à la Révolution de 1959.
Au petit matin, quand le soleil se lève sur la plage où Lucia et Thomas se sont endormis, leur vision de l’île n’est plus la même. Mais, alors qu’ils pensaient tous deux en connaître la vérité profonde, ils doivent bien avouer que la réalité est bien plus complexe …
Le film se termine sur un zoom arrière qui permet de découvrir, derrière les personnages allongés sur le sable, la ville qui se réveille doucement, tandis que résonne la chanson de Raul Paz « Flores » :
« … Y hay días que me siento bien
Y hay días que quiero correr
Y salgo a ver la claridad respiro al saber
Que hay gente que al pasar
Sueña que caeran flores en la ciudad… »*
*… et certains jours, je me sens bien
Certains jours, je veux courir.
Et je sors voir la lumière, ressentir la pensée
Qu’il y a des gens qui, en marchant,
Rêvent que des fleurs tombent sur la ville…