Destination : 145 , Fées d'hiver


Un cambrioleur bien mal avisé

Il fait nuit. Dans le petit parc de cette maison victorienne, une silhouette noire se faufile entre les arbustes et se dirige vers la porte située à l'arrière. Sur les marches, des pots de fleurs alignés de chaque côté se voient tâtés, soulevés par des mains impatientes. Enfin, sous l'un d'eux se trouve l'objet tant désiré : une clé. Le volet, simplement bloqué par une pierre, n'offre aucune résistance. La porte, quand à elle, reconnaît l'outil en fer et s'ouvre dans un léger cliquetis de serrure bien graissée. Enfin dedans ! La respiration courte et le cœur battant, le cambrioleur écoute les divers bruits de la demeure. Il n'y a personne, il a bien vérifié. La vieille dame qui vit ici est partie pour un séjour prolongé chez son fils. Décrite comme excentrique, elle est connue dans le quartier pour son aisance financière et sa grande méfiance dans tout organisme bancaire. Elle doit donc posséder beaucoup d'argent chez elle. Et de l'argent, il en a besoin.



La vieille bâtisse s'offre à lui. Prenant l'escalier en s'éclairant d'une lampe de poche, il monte vers les chambres. Dans chacune, un lit, une table de chevet, une armoire. Sans rien déranger ni saccager, l'homme fouille, tâtonne. Il visite le moindre recoin de chaque meuble, le plus petit tiroir. Rien. Il n'a pu trouver que des cartons entiers de papiers et de photos plus ou moins jaunies. Le temps passe : il lui faut se dépêcher. Redescendant au rez-de-chaussée, il entre dans la cuisine. Tout est méticuleusement parcouru, y compris le congélateur. Sans résultat. Au diable ces films idiots où l'on trouve aisément des trésors dans le compartiment à glaçons ou dans la farine.



Ne reste plus que la grande pièce qui fait salle à manger et salon. Une table ronde y trône ainsi qu'un grand canapé et un fauteuil. Voilà maintenant trois heures que l'homme se démène. Il est fatigué et surtout très découragé. Qu'importe ! Le butin ne peut plus se trouver que dans cette pièce, à supposer qu'il y en ait un, le doute s'immisçant peu à peu dans son esprit. A nouveau tout y passe : les coussins du divan et du fauteuil sont malaxés, les dessous de table tâtés. Même les cadres sont soulevés. Sans compter les meubles qui sont eux visités de fond en comble. Rien. Le découragement l'envahi alors. Épuisé par toutes ses émotions, il s'écroule sur le canapé. Voilà deux nuits qu'il ne dort plus, trop occupé à prévoir les moindres détails de sa « visite ». Mais à aucun moment il n'a pensé que l'argent ne serait pas au rendez-vous. La déception et la fatigue lui tombent dessus comme une chape de plomb. S'allongeant, il réfléchit. Où donc la vieille dame a-t-elle pu cacher son pécule ? Ses paupières alourdies se ferment doucement sans qu'il n'y puisse rien. Juste une minute, pense-t-il alors avant de sombrer complètement dans un profond sommeil.



La lumière crue du lustre le réveille quelques heures plus tard, allumée par des policiers qui se saisissent immédiatement de lui. Hébété, il ne peut croire à ce qui lui arrive. Répondant aux multiples questions qui lui sont posées, il avoue bien vite n'avoir rien trouvé. La vieille dame entre alors dans la pièce, les yeux pétillants de joie. Convaincue par son fils de déposer enfin son argent en banque, elle n'avait eu de cesse de le faire immédiatement. C'est donc dès l'aube qu'elle était revenue accompagnée de sa famille, pour mettre en lieu sûr toutes ses économies. Découvrant le cambrioleur profondément endormi, ils avaient aussitôt contactés les forces de l'ordre. Abasourdi, l'homme ne peux s'empêcher de faire remarquer qu'il n'y a pas d'argent dans la maison. S'approchant de son enfant, l'octogénaire lui demande alors de basculer complètement le canapé, offrant ainsi à la vue de tous, un matelas de billets de grande valeur soigneusement empaquetés et directement agrafés sur le fond du meuble. Se tournant enfin vers l'assistance médusée, elle rétorque en riant, qu'il n'en avait jamais été aussi près, pourtant !!!















LYDIE F