Destination : 139 , Le cimetière des livres d'Ailleurs


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Destination 139 : le cimetière des livres d’Ailleurs



Il fait une température caniculaire, le thermomètre à mercure tend a éclater tellement il est poussé à son maximum. Les murs, tapissés d'une moquette rouge et étouffante, transpirent. Le plafond craquelé a perdu son blanc immaculé et s'est transformé en une sorte de glaise noirâtre, poreuse, dégoulinante et puante. Le sol aussi s'exprime, il crie par la transpiration. Ses tapis rouges et noirs qui devaient être des oeuvres d'art de valeur ressemblent à une tonsure animale dont l'odeur est proportionnelle à son visuel.

Ces pelotes de laine mouillées sont tellement imbibées que chaque pas laisse une empreinte. Même au bout de la pièce, je peux voir quel a été le parcours de Fermin.

Il faut dire qu'avec sa pointure 45 ce ventre ambulant de 8 ans et demi ne respire pas la discrétion. Cette pièce était sale et étouffante, j'en pouvais plus d'attendre le gros. Il me disait qu'il allait trouver le trésor. C'est sûrement l'hypoglycémie qui lui faisait perdre les pédales, et ce n'est certainement pas dans ce taudis qu'on allait pouvoir rafraîchir le pancréas de monsieur.



Au bout de 4heures 28 minutes et 31 secondes (c'est précis mais en même temps devenir une horloge parlante c'était devenu ma seule et unique passion du moment) Fermin a hurlé tellement fort que la seule et unique lucarne existante s'est brisée.



-Daniel vient voir vient voir, Daniel ça y' est on est riche on est riche, à nous la liberté

-Qu'est ce que tu racontes Fermin? on est riche de rien du tout, et puis maintenant j'en ai marre de tes sornettes on rentre papa m'attends



Un bruit sourd et agressant se fit retentir. La structure de la pièce peu a peu s'affaissait, le vent faisait souffler son ombre et en quelques secondes la lumière se transforma en pénombre et la seule possibilité de voir Fermin c'était de l'entendre...

Un laps de temps passa, je ne sais pas si l'obscurité s'était dissipée ou si par un mécanisme de défense non homologué nous étions devenus nyctalopes, mais tout fut plus clair.

C'était à n 'y rien comprendre, un phénomène totalement anti-cartesien s'était produit. L'endroit dans lequel nous étions était devenu idyllique.



Les murs se fourvoyaient en arc en ciel. La lucarne percée s'abreuvait de la fraîche lumière et venait illuminer la pièce.



- Daniel regarde ouahhhhhhhh Daniel regarde



Je restais ébahi face a cette folie douce, des livres de toutes les couleurs déferlaient de toutes parts. Ils avaient chacun leur latitude et leur parfum respectifs.



Les violets et indigos virevoltaient au niveau de nos chevilles diffusant un parfum de betterave très alléchant. Leur couverture étaient tout en fleur de lavande et l'écriture était en encre du légume violacé.



Les bleus venaient se suicider sur nos genoux, ils étaient entièrement fais en bonbons stroumpfs, les pages collaient un peu entre elle mais dégageaient une odeur de menthe glaciale. Fermin réussi a lire le nom de la collection Bleutifer et son épée foudroyante.



Les verts batifolaient au niveau de nos hanches (toutes sveltes!!!!). Ils étaient reliés par des tiges de fleurs tressées les unes aux autres et le texte était gravé soigneusement sur des feuilles de chênes séchées. On pouvait humer la bouleversante et agréable odeur d'herbe fraîchement coupée à chaque page qui se tournait...Ils avaient l'air si délicieux ses outils épistolaires...



Les jaunes étaient si éblouissants et si rassurants que nos sourires s'étaient mécanisés tel un état de béatitude complet. Ils heurtaient sagement notre plexus solaire. Ils étaient pailletés d'or et la couverture était brodée en épis de blé. Elle était si douce... Les pages une a une, sentait la banane caramélisée. Les livres dorés étaient triangulaires et les succulentes pages se tournaient grâce une alliance fixée en leur sommet. Ceux là semblaient dédiés aux histoire d'amour mais Fermin et moi on trouvait que les adultes qui s'embrassent c'est dégoûtant alors on ne s'y ait pas attardé.



Enfin les livres rougeâtres se dispersaient à hauteur de notre coeur. Ils avaient des épines partout, ils prenaient la forme de boules et étaient brûlants. Pour lire leur contenu il fallait les couper en deux comme une noix de coco. Une fois brisé, il y a avait toujours deux parties du livre dans chaque hémisphère. Toute page lue se transformait en cendre. Il fallait absolument bien être studieux pour lire ces livres. Leurs odeurs de piment de Cayenne étaient tellement odieuse que nos yeux ne pouvaient cesser de se noyer dans nos larmes. Fermin et moi on avait chacun une boule piquante qui nous entaillait la peau.

Étant a vif et ne pouvant plus supporter ces attaques j'ai ouvert ma boule pot de colle (ce qui m'a valu de multiples coupures mais je ne me plains pas).

A l'ouverture, ma réaction lacrymale dû a ce condiment sud américain ne se fit pas attendre...Les yeux embués, je réussi a décrypter Daniel voici le livre de ta vie.

Stupéfait de tomber sur un titre qui avait mon prénom, je dégusta le livre page après page. J'avais du mal à les tourner parce qu' elles étaient rondes et collées les unes au autres par le jus de piment! En plus elles me brûlaient les doigts et me les rendaient noirs de suie. Après avoir fait abstraction des inconvénients matériels je me suis plongé dans ma lecture. A la fin du livre je pleurais à chaudes larmes. Mais celles là c'était les miennes. Ces écrits m'ont fait vomir ces larmes de mon coeur.. J' y ai appris comment mon père n'était pas le mien, comment maman ne m'a jamais désiré, comment je n'étais qu'un' accident et surtout comment elle s'est donnée la mort pour rejoindre l'amour de sa vie afin de vivre .





-Daniel, Daniel, oh oh Daniel

-laisse moi, laisse moi Fermin, laisse moi je veux mourir là. Je vais me tuer avec mon livre plein d'épines.



-ouh ouhhhhhh Daniel reprends toiiiiiiiiiiiii y a la prof qui t'appelles, je crois que tu regardes trop la télé et ton subconscient est un court-circuit continu, allez réveilles toi sinon tu vas encore finir coller



Daniel ouvrit les yeux, il avait trempé sa copie avec toutes ses larmes oniriques.

Il pris un bon moment pour réaliser ou était sa réalité.

Dans son silence salvateur, il se mit a penser: il est là mon trésor, elle est la ma liberté, ma richesse. Elle est dans mon quotidien. Ce que c'est chouette d'avoir Fermin comme camarade.



Justine le 12/07/10





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