Destination : 12 , Affligeantes banalités!
Rappelle-toi Barbara
- Oh! Judith! Tu es revenue de P.?
- Eh bien, oui, en effet...
- Et tu as l'air en pleine forme, ça te réussit le grand air!
- Oui...la campagne...
- Ça faisait un sacré bout de temps que je ne t'avais pas vue. Pas à dire,
tu ne changes pas!
- Merci, c'est bien aimable...
- Et puis tiens, laisse-moi t'embrasser...Mmmm...tu as toujours le même
parfum, ça c'est formidable, c'est bien "L'Heure bleue", je ne me trompe
pas?
- Oui, c'est ça...
- Ah Judith! Attends, laisse-moi t'aider, tu es trop chargée, toutes ces
bouteilles d'eau!
- Merci, mais...
- Allez, je te raccompagne à ta porte et, promis je t'y laisserai! Ah
Judith! quand on y pense, toutes ces journées, et surtout, ah Judith, toutes
ces nuits! On peut dire qu'on a passé des mois sans dormir...Folie de nos
corps, aïe, aïe, aïe...Tu n'as pas idée, quand je pense à cette chambre,
cette toile aux murs, noisette, je ne me trompe pas?
- Non...
- Et le lit! Ah le lit! face à la fenêtre, quand le seringat était en
fleurs, nous laissions tout ouvert, et cette odeur le soir...Il est toujours
là, le seringat?
- Oui...
- Judith, je peux bien te le dire maintenant, tu as été mon meilleur coup,
et pas seulement, certains diraient que c'est déjà bien, mais c'est bien
plus, je crois bien que tu auras été la femme de ma vie, la seule avec qui
je ne me sois jamais ennuyé, et tu te rappelles, quand on s'est connus,
combien j'étais difficile!
- Euh...
- Mais nous y sommes, nous voici arrivés. Bon, je pose ton panier. Veux-tu
que je t'aide à le rentrer?
- Non, merci, ça ira...
- Ah Judith! Allez! Encore une bise et je te quitte. A quand? Chi lo sa?
- Si, certo! Chi lo sa!
Judith sortit les clés de son sac, ouvrit le portail, ramassa son panier et
pénétra dans la maison. Elle referma soigneusement derrière elle, puis
respira un grand coup.
- Mais qui c'était ce type? Jamais vu de ma vie! Son meilleur coup! Et quoi
encore! Pas pour moi en tout cas!
Elle rangea ses emplettes, monta dans sa chambre et se dirigea vers un petit
secrétaire.
- Voyons, où est cette liste? Voyons, voyons, ce n'était
pas...ni...alors...non...ni lui...ni...
Le soir la trouva songeuse et méditative sur l'âge qui transforme en trolls
stupides les amants du temps passé.