Destination : 18 , Détournements majeurs.


On a toujours besoin d'un petit pois chez soi.


Vous avez vu ? Ouais... vous ne rêvez pas ! Je suis bien dans une vitrine de Musée !Ah sûr, j'ai eu plus de veine que mes potes, eux ils sont en boîtes de conserve pour certains. Quant aux autres, ils ont fini au fond des casseroles ! Faut dire aussi que j'ai bien mérité d'être là !



Imaginez... je poussais tranquillement sur ma hampe, en plein champ, quand un jour une horde de sauvages est venu me cueillir avec les autres. J'entendais des mots terrifiants comme : "prépare les pigeons, la garniture arrive" ou encore "tranche le lard et pèle les oignons, la cueillette se termine, ils sont ronds à point" ! Vous dire si j'avais des sueurs froides ! Les copains ne mouftaient plus dans la cosse. Le calvaire a continué dans le panier qui nous a transporté. Ballotés... tourneboulés... et pour finir... SSSLLLAAAAAMMMM... vidés sur une grande table ! Là, je me suis dit : "Bébert, t'aurais dû faire ton testament", mais j'avais rien à léguer, me restait plus que mes yeux pour pleurer. Mais on m'a toujours dit qu'un petit pois ne pleure jamais, alors... stoïquement, j'ai attendu la fin.



Au bout de la table, il y avait une sorcière très vieille et très moche, qui jubilait à chaque fois qu'elle avait vidé une cosse. J'entendais les copains tomber au-fur-et-à-mesure dans une grande bassine... le tas diminuait... elle arrivait... je voyais ses gros doigts crochus se rapprocher de moi... ça y était ! Notre cosse était attaquée... j'ai entendu les trois premiers copains rejoindre les autres dans la bassine... ça allait être mon tour quand... Miracle !!! Ou ce que vous voulez !!! La porte s'est ouverte à grand fracas et la Reine (oui la proprio de la baraque et la patronne de la sorcière) a hurlé :



- Mélanie !!! Garde-moi un petit pois, j'en ai un besoin urgent !



Et comme j'étais celui qui se tortillait dans sa main, la vieille moche m'a tendu à la Reine. Ouff... je ne savais pas encore quel sort m'était réservé, mais au moins j'échappais pour l'instant, à la garniture des pigeons ou à celle des petits lardons !



La Reine m'a pris entre le pouce et l'index, m'a levé à hauteur de ses yeux et a dit :



- Humm... oui, un peu maigrichon, mais ça devrait convenir !



Maigrichon ! Elle charrie la patronne... et mes cours de musculation, hein ? A quoi ils ont servi ? Bon, ne tergiversons-pas, le principal c'est que je convienne !



Sans un merci à la sorcière, elle ressort de la cuisine en me serrant très fort dans son poing. Aïe.. qu'est-ce qui m'attendait encore ? Même momentanément sauvé, je n'en menais par large ! "je pensais : "Bébert, t'es pas sorti de l'auberge ! Ne te réjouis donc pas" ! D'autant plus que, j'entendais des voix dans une autre pièce ; j'ai bien cru que la Reine allait me déposer sur le bord d'une assiette, mais... non ! Elle ne s'est pas arrêtée, elle a monté un escalier et dans sans doute ce que les humains appellent une chambre à coucher, elle m'a déposé sur un matelas et elle est sortie.



Mettez-vous à ma place, malgré mon désarroi, j'étais épuisé par les émotions et j'allais piquer un bon roupillon quand... rebelote, la Reine revient avec, derrière elle, une dizaines de bonnes femmes, toutes chargées soit d'un matelas, soit d'un édredon... Si j'avais pu parler, j'aurais dit que un seul matelas me suffisait, mais... j'étais trop vanné pour prononcer un mot !



J'allais gentiment me rendormir quand, imaginez deux montagnes qui vous tombent dessus ! C'est ce qui m'est arrivé ! J'ai compris que si je ne me gonflais pas un max, j'allais être étouffé ! Ces chipies m'avaient recouvert des matelas et des édredons !!! Après avoir échappé aux conserves, j'allais finir à l'étouffée !!! Alors, pour sauver ma peau, j'ai fait comme "la grenouille et le boeuf" (mais ça c'est une autre histoire), je me suis gonflé, gonflé, gonflé... Heureusement, car le pire n'était pas arrivé !



J'étais au maximum de ma gonflette, quand tout-à-coup, un semi-remorque. quoi ? Ils n'en existait pas encore ? Ah bon, j'ai cru... alors disons deux boeufs d'une tonne chacun, plus la charette, plus une famille de sept personnes se sont ajoutés à mes matelas et mes édredons... et ben vous n'allez pas me croire... j'ai tenu bon !!!



Le lendemain, je me suis dit : "je referai pas ça tous les jours" ! Et Dieu merci, je n'ai pas eu à le refaire car, le jour devait s'être à peine levé et les deux boeufs, la charette et la famille de sept personnes aussi, que un à un, je sentis qu'on retirait les matelas et les édredons.



Ouff... je me sentais nettement mieux ! Enfin, je pouvais souffler un bon coup et reprendre une taille normale ! Mais... la suite ? Qu'allait-il m'arriver après ce calvaire ? La Reine me prit délicatement entre ses doigts, me déposa doucement sur un mouchoir de percale et m'emmena hors de la pièce... je ne vous cache pas que j'étais très, mais alors très inquiet quant à mon avenir... finalement, j'avais tort !



Nous nous sommes retrouvés, la Reine et moi devant un très vieux bonhomme à longue barbe grise, qui discutait avec un jeune gringalet. Chacun à leur tour, le jeune et le vieux m'examinèrent avec un hochement de tête en direction de la Reine... je me demandais à quoi rimait tout cela. quand j'entendis la Reine dire :



- Mon fils, tu peux l'épouser, c'est une vraie princesse ! Elle a senti le petit pois !



C'était donc ça ! J'avais servi de test !!! Et maintenant, je suppose que j'allais compléter le repas de noces ?Heureuement qu'il n'en fut rien ! Bien au contraire... je fus déposé sur le velours blanc d'une boîte en or, au centre d'une vitrine pleine d'objets précieux.



C'était il y a très longtemps, tous les membres de la famille ont disparu mais moi, j'existe encore et j'ai conservé ma fraîcheur... Maintenant, je suis dans un Musée, parce que l'on a considéré que mon mérite avait été grand... vous n'avez pas vu la jeune mariée vous ? Moi, je l'ai supportée... souvenez-vous les boeufs, la charette et la famille de sept personnes !



Mady