Destination : 2 , En route vers l'Afrique.
Tunisie, terre de contraste
Istanbul : La Guerre des Lampes à Huile
En l’an 1283 du calendrier turc, l’Iman Ahmed Fouad décréta, selon une stricte application d’un passage obscur du texte coranique, que le mariage de la terre et du feu devait être strictement réglementé.En moins de six semaines, toutes les lampes à huile faites d’argile
disparaissaient de la surface de l’Empire.
Suite à l’entrée en guerre avec l’Autriche-Hongrie, tout le cuivre et le fer du Sultanat fut réquisitionné. Les rares quinquets rescapés du premier massacre y passèrent à leur tour.
Une nuit noire s’abattit sur les campagnes, mais l’Iman restait inflexible.
Le Padishah eut alors l’idée lumineuse appropriée, en édictant que toutes les lampes à huile seraient désormais fabriquées en verre soufflé.
Tunisie : Un Désert copieux
Un fructueux commerce débuta alors avec la Tunisie, dont le silice le plus pur de la Méditerranée faisait l’admiration des maîtres verriers.La Sublime Porte payait son sable en denrées comestibles, originaires de chine via la Perse.Tunis découvrait le moyen d’exploiter ses dunes stériles, et succombait aux vertus nutritives des pâtes alimentaires.
C’était en 1903, au temps béni où Léon XIV régnait sur l’Afrique.
Venise : Dalla Piestra bétonne la Lagune
L’arrivée inopinée de Sa Sainteté Clément XV (Ex-cardinal Cupidonio Dalla Piestra) à Venise au printemps 1904 et l’installation de l’administration vaticane dans la cité des Doges ont donné lieu à un boom immobilier jamais vu depuis le Quattrocento.
Bénéficiant d’un financement à fonds perdu de la part du Kaiser, qui rêve en secret de rétablir le Saint-Empire jusqu’à Naples, Dalla Piestra a décidé de faire de la nouvelle capitale des Etats pontificaux un Vatican-Bis plus prestigieux que le premier.Clément XV est allergique à l’eau. Les perpétuels trajets en gondole achèvent de donner au Saint-Père la nausée des canaux.
Le Pape ordonne l’édification d’une digue et procède à l’assèchement progressif de la lagune.
Les terres dégagées sont autant de terrains à bâtir dont Sa Sainteté s’octroie la propriété au moyen de la Bulle « Quo non Descendam » .
Vatican-Bis : la tomate sauve l’immeuble
Sous l’impétueuse direction de l’Abbé Gaudi del Orta, l’architecture néo-baroque se déchaîne sur l’ancienne lagune bétonnée à ras. Des colonnades monumentales s’élancent à l’assaut du ciel.
Bientôt le ciment fait défaut.Un silence de mort tombe lourdement sur les orgueilleux chantiers papaux.
Mais Clément XV réagit avec énergie : Sa Sainteté prend le contrôle du commerce extérieur italien et conclut le contrat du siècle avec la Tunisie, reconnaissant de Iure son indépendance politique.
La duchesse Donatella de Pietranera assure l’intérim du gouvernement tunisien en l’absence de son oncle le cardinal Finzi-Bronstein. C’est avec elle que Dalla Piestra signe la Convention de Carthage, qui lui concède les deux tiers des dunes sablonneuses du sud tunisien. Au prix fort, car le Sultan de son côté faisait monter les enchères.
En échange, Rome inonde la Tunisie de ses surplus agricoles, principalement la tomate napolitaine. Le Pape peut ainsi achever l’édification de la Venise brute de décoffrage, tandis qu’on remarque une nouvelle pénurie de lampes à huile dans les mosquées ottomanes.
Les tunisiens, eux, baignent dans l’euphorie. Ils peuvent désormais agrémenter leur mets préféré d’une sauce savoureuse, et ainsi naquit le plat national tunisien : le ravioli sauce tomate.