Destination : 31 , Une saison Ailleurs
Saisons d'Ailleurs
La première sensation ressentie en sortant du sommeil fuat que
l'odeur était différente. Comme à son habitude, elle s'étira le plus loin
possible, jusqu'à sentir les doigts de pieds se raidir sur le drap. Les
doubles rideux entrouverts voletaient doucement et elle vit la pelouse. La
voilà l'odeur acre et mouillée de l'herve au petit matin. Elle sortit, y
posat les pieds avec précaution, comme pour ne pas l'abimer. A la fois
douces et légèrement piquantes, des milliers de petites aiguilles lui
envoyèrent des rayons de chaleur. Un chat noir passat, la regarda. Elle
l'appella mais il paraissait sauvage. Un chat noir ! Etait-ce un bon ou un
mauvais présage ? Il se roula dans l'herbe aussi elle décida que c'était un
très bon signe. Enhardie, elle fit quelques mètres vers la mer toute proche.
Elle attendait beaucoup de ces quelques jours en Crête mais ne pensait pas
se trouver, dès le premier matin, au Paradis. L'eau était tiède, les
premiers rayons du soleil doraient les vaguelettes. Adepte du Taï Chi, elle
tendit les bras pour engranger la première force de la journée, inspirant
l'air, se gargarisant de bonheur.
Il fallait tout de mème revenir retrouver son compagnon,
probablement mort de faim. Elle avait déjà pris un petit déjeuner de nature,
il fallait maintenant se régaler de vrai pain et de miel crétois.
Dès lors, une seconde nature vint l'habiter. Elle se prit à
s'occuper de son corps, l'exposant jusqu'à ce qu'il prenne une couleur
dorée, le rafraichissant, le drapant dans des paréos, elle si pudique
d'habitude. Le soleil brulant lui fit faire l'acquisition d'un adorable
chapeau de paille. Le soir arrivé, elle allait diner en robe longue et
tongues découvrant des doigts de pieds aux ongles vernis.
Elle sentait son compagnon heureux, détendu. Ils
découvrirent l'arrière pays, main dans la main, ce qui n'était pas arrivé
depuis longtemps. Le paysage lui rappelait étrangement les Cévennes, son
enfance remontait en elle à travers les odeurs et les couleurs. Par des
études généalogiques, elle savait que ses aieux avaient quitté la Grêce pour
s'installer en Cévennes et elle recherchait à tout instant les liens
existant entre ses ancêtres et sa propre personnalité.
Il faut partir un jour. Cette fois là, ce fut avec la ferme
intention de revenir. A l'arrivée le ciel était gris et elle se sentit
stupide avec son chapeau de paille. Mais, pas question de le ramener écrasé
au fond d'une valise. Paréos et tongs furent soigneusement rangés au fond de
l'armoire.
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Au matin, elle ressentit un violent pincement dans les
membres ; engourdie, elle allat jusuq'à la terrasse. Deux feuilles rousses
voletaient, l'automne n'était pas loin. Elle avait oublié pendant quelques
jours qu'elle avait 60 ans.