Destination : 85 , Itinéraire assassin


Technicien de surface

Je suis l'homme à tout faire, le balayeur, le "technicien de surface", comme ils disent pour me faire croire que j'ai de la chance. Plus exactement, je suis agent technique dans une école supérieure de commerce. Je fais le ménage, je charge et décharge les colis, je renseigne les visiteurs occasionnels, et bien sûr, je suis chargé de préparer les réceptions alcoolisées de ces grands philanthropes...

Ce soir, les petits plats sont dans les grands: c'est le pot de début d'année, le pot de bienvenue en quelque sorte. Bien sûr, je trime autant qu'ils boivent, tous ces enfants à papa qui s'imaginent que le sort du monde est entre leurs mains. Le saumon par-ci, le champagne par-là, la nappe comme ceci, les fleurs comme cela... Une application proportionnelle aux frais d'inscription. Je prendrais ce boulot à coeur si mon revenu était égal à ce que ces "étudiants" espèrent gagner plus tard. Et encore.

Aujourd'hui, j'ai l'intention, pour une fois, de casser quelque peu la routine habituelle. Je prépare seul dans l'arrière - cuisine de l'établissement la dernière tournée de champagne millésimé, le bouquet final que personne ne souhaite en général manquer.

Les étudiants de sup de co ignorent que j'officie également - toujours comme souillon - chez leurs collègues chimistes. Là-bas, j'ai accès à tous les produits possibles et imaginables. Je vous épargne les appellations, mais ils sont tous moins comestibles les uns que les autres. Ce matin, j'ai prémédité mon coup en subtilisant une fiole d'acide sulfurique. Une valeur sûre.

Quarante coupes de champagne sont là, devant moi. Soit quarante étudiants de commerce de qualité supérieure. Deux gouttes du précieux liquide dans chaque ration suffiront à mon bonheur.

Je suis absolument seul dans la pièce qui, de toute façon, est fermée à clé.

Je sors pour faire le service.

"A votre santé. Bonne soirée. Que vos études soient joyeuses et réussies. Et à demain!" leur lançai - je.

Que voulez - vous, j'ai toujours eu du mal avec les commerciaux...

Cédric