Destination : 225 , Mang’Ailleurs
Emôti(c)ones
EMÔTI(c)ONES
Arrivée depuis à peine une heure, j’ai été accueillie dès ma sortie de l’aéroport par une tempête d’eau et de vent : « bienvenue à Tokyo », semblent me lancer les éléments déchainés. Je tente de suivre le plan que m’a préparé une amie japonophile mais peine perdue : en trente minutes à peine, c’est moi qui suit (O|O) !
La ruelle est sombre dans le soir qui tombe. Quelques lampadaires blafards percent le rideau de pluie qui s’abat sur la ville. On ne distingue rien à l’exception de la grisaille des trottoirs, des murs sur lesquels de vagues affiches lancent de belles promesses. Seule, trempée, je me sens (´_`).
Mon regard accroche une enseigne clignotant à quelques pas de moi. Un rectangle vertical sur lequel flamboie un soleil rouge dardant ses rayons sur une ligne d’horizon. Quelques sinogrammes calligraphiés : un bar, je suis (*^▽^*) !
Je pousse la porte, un carillon à vent signale mon arrivée. Je lance un timide « bonjour » mais aucune voix ne me répond. Un rapide coup d’œil m’apprend que le troquet est quasiment vide, à l’exception d’une table ou quatre types jouent aux cartes. J’ai l’impression de (>_<)…
Je m’approche du bar et pose mes fesses sur un tabouret. Sur le mur d’en face, une télé écran géant diffuse en continu des clips vidéo de chansons de collégiennes. J’enlève mon imper pour le poser à côté de moi…
- Vous avez un portemanteau à côté de l’entrée ! (≧∇≦)
- Oh, pardon…
J’obéis à l’ordre du serveur et reviens m’asseoir. Je commande un grand café que je règle en même temps, aussitôt servi dans un gobelet taille XXL qui fume autant qu’une centrale vapeur. Comment un café peut-il dégager autant de vapeur ? J’en suis (O_O)!!!
A ce moment-là, une femme entre dans le bar. Grande, maigre, elle semble à peine tenir sur ses jambes nues, couvertes d’hématomes. Ses cheveux blonds ondulés, coiffés en couettes, dégoulinent sur ses épaules. Elle s’approche du bar, ses grands yeux bleus son nez retroussé et ses taches de rousseur me rappellent quelqu’un mais impossible de savoir qui… :(^_^;)
Elle s’adresse au barman toujours derrière son comptoir :
- Dis, t’as pas vu Annie ?
- Non, elle est pas passée aujourd’hui…
- T’es sûr ? ça fait deux jours… t’as vérifié dans la boîte aux lettres, des fois qu’elle soit venue avant l’ouverture ??
- Ouais, j’te dis ! C’est sûr de sûr !!! Y’a rien dans la boîte aux lettres ni ailleurs ! Aujourd’hui va falloir te démerder !!! Tu sais qu’elle est trop gentille avec toi, moi à sa place, j’te jure que je t’aurais envoyée promener depuis longtemps !!!
- Mais enfin, c’est ma sœur quand même (´_`) !!!
- Ta sœur, pas tout-à-fait quand-même ! Et toi, justement, si tu l’aimais, ta sœur, tu crois pas que tu lui foutrais la paix ??? Avec son boulot et ses enfants, tu crois pas qu’elle a mieux affaire que d’avoir un boulet comme toi qui lui réclame toujours du pognon !?!
Un des types assis à la table intervient. Dos à nous, sans se retourner, sa voix puissante nous parvient cependant très clairement et son intonation ne laisse aucun doute sur sa ( ̄m ̄) :
- Oh ça va ! Fous-lui la paix avec ta morale ! File lui un café de ma part et on en parle plus !!!
La femme remercie en chouinant, le barman lui donne son café dans un verre en plastique et elle repart avec son breuvage affronter la pluie et la rue. Je saisis un vol un « bon débarras » grommelé entre les dents. J’ai assisté à la scène sans intervenir, un peu (^^;,) il faut le dire. Je saisis la balle au bond :
- C’était qui cette fille ? J’ai l’impression de l’avoir déjà vue quelque part…
- Elle ? C’était pas dans un écran, au milieu des années 80, par hasard ???
- … (#^.^#)…
- Parce qu’à cette époque-là, elle a fait un carton, c’était une vraie star mondiale la gamine !!! Candy, elle s’appelle ! Tu la remets ??? A l’époque, c’était pas un pseudo d’actrice porno, hein ! Candy, c’est Candy : la seule et l’unique !!!
- Can… Candy ??? Candy, de « Au pays de Candy, comme dans tous les pays, on s’amuse, on pleure, on rit… » ??? ( ̄□ ̄;)
- Bah oui c’est bien elle !!! Candy au pays des méchants et des… pas gentils !!!
- Mais… que lui est-il arrivé ? On dirait qu’elle est…
- … Shoutée ? Camée ? Droguée ? Toxico ?
- Ben…
- Ben quoi, c’est ça, t’es en plein dans le mille !!! Trente ans qu’elle est accro à la poudre, la Candy, et pas de sucre, ha ha ha !!!
- Elle est devenue toxico ? Mais … pourquoi ? Comment ? Tout semblait aller si bien pourtant, après tout ce qu’elle avait traversé…
De la table derrière moi, la même voix que tout à l’heure se fait entendre pour répondre à mes questions :
- Faut croire que découvrir que le type après lequel on a couru toute sa vie est en fait celui que vous appelez « tonton », c’est pas aussi folichon que ça en a l’air !!! Et puis, qu’est-ce qui lui restait, après ça, à Candy, pour rêver ? Son prince des collines était son oncle, son cher orphelinat a été détruit pour construire une centrale nucléaire… Elle a commencé par prendre des médocs et puis, elle a fini par tomber dedans, tête la première…
- Mais alors… Annie ? C’est… Annie ?
- Tu veux que ce soit qui d’autre ? Bien sûr que c’est Annie ! Annie qui reste jamais très loin, qui lui file un peu de fric de temps en temps pour l’aider à vivre même si elle sait qu’en vrai, ça lui sert à payer sa came !!! Mais elles peuvent pas se lâcher, c’est comme ça depuis qu’on les a trouvées bébés le même jour au même orphelinat… ( ̄ー ̄)
Sans m’en apercevoir, je me suis approché de la table à laquelle mon interlocuteur –dont je ne connais toujours pas le visage- est assis. C’est alors que je ne suis plus qu’à quelques pas d’eux que je manque tomber à la renverse : Actarus (le prince de l’espace, maître de Goldorak), Albator, Ulysse 31 sont à ses côtés. Et lui, cette tignasse blanchie dans laquelle trainent encore quelques mèches rousses, je n’en crois pas mes yeux… Mon héros est en face de moi, celui dont j’ai été éperdument amoureuse entre 7 et 9 ans environ, Capitaine Flam en personne. Je suis (**o**) !
Qu’est-ce que ce serveur a bien pu glisser dans mon verre ??? Je dois être complètement(´ー`)c’est pas possible autrement !!! Ou alors… je suis dans un café de fous, échappés d’un asile psychiatrique…
Je me lève, recule vers la porte, récupère mon imper et ma valise et sors de la pièce sans demander mon reste. Il pleut toujours autant mais je me sens désormais plus en sécurité dedans que dehors. Je choisis au hasard de partir à gauche et me retrouve bientôt sur une artère plus importante. Tant pis pour la dépense : je fais signe à un taxi et lui indique l’adresse de l’hôtel conseillé par mon amie.
Dix minutes plus tard, j’étais dans mon lit, un peu groggy mais épuisée. Je me suis endormie en trente secondes et j’ai pioncé comme un loir !!! (*^▽^*).
***
Le lendemain, le ciel était d’un bleu limpide. J’ai découvert une ville magnifique, étonnante, si éloignée de ce que je connaissais jusque-là. Je ne savais plus si cette histoire était réelle ou si j’avais mélangé dans la nuit, le rêve et la réalité. Je n’ai jamais cherché non plus à retrouver ce bar, ni cette ruelle… A vrai dire, j’en aurais été bien incapable (^_^) !!!