Destination : 63 , Surprise !


Les Chants de Noël

« Oh ! Quand j'entends chanter Noël

J'aime revoir mes joies d'enfant

Le sapin scintillant, la neige d'argent

Noël, mon beau rêve blanc



Oh ! Quand j'entends sonner au ciel

L'heure où le bon vieillard descend

Je revois tes yeux clairs, Maman

Et je songe à d'autres Noëls blancs »



Quand j’étais petite fille, la veillée de noël se passait, jusqu’à ce que l’âge les empêche de poursuivre cette tradition et que ma mère prenne à son tour le relais, chez mes arrière-grands-parents, qui vivaient dans un petit village du sud du Lot-et-Garonne. Nous arrivions vers 19h, pour que les adultes puissent aider grand-mamie à préparer la soirée, tandis qu’avec la tribu des cousins et cousines, nous jouions et discutions, assis en cercle autour du sapin dont nous admirions les lumières clignotantes et la variété des décorations suspendues à ses branches : boules de verre multicolores, douces guirlandes argentées, pommes de pin recouvertes de peinture dorée, petit sujets de bois vernis …



« Mon beau sapin, roi des forêts

Que j’aime ta verdure.

Quand par l’hiver, bois et guérets

Sont dépouillés de leurs attraits

Mon beau sapin, roi des forêts,

Tu gardes ta parure»



A voix basse et les yeux brillants d’excitation, nous répétions les vœux de nos lettres postées quelques semaines plus tôt, espérant les voir se réaliser bientôt… Nous avions ensuite, nous, les plus jeunes, l’obligation d’avaler un grand bol de soupe maison, accompagné d’un morceau de fromage avec du pain. Puis, vers 20h45, nous partions en famille assister à la messe chrétienne, suivant notre aïeule pour laquelle c’était un passage obligatoire en cette nuit sacrée. Nous nous rendions à pieds jusqu’à la petite Eglise du village, rejoignant la file des voisins qui empruntaient le même chemin, le long de rues froides et brumeuses, éclairées par quelques pâles lampadaires. Nous chantions pour nous réchauffer, et devant nos bouches enfantines, nos souffles formaient de petits nuages ronds.



« Vive le Vent, vive le vent, vive le vent d’hiver,

Qui s’en va, sifflant, soufflant, dans les grands sapins verts

Vive le Vent, vive le vent, vive le vent d’hiver,

Boule de neige et jour de l’an, et bonne année grand-mère !

Sur le long chemin tout blanc de neige blanche

Un vieux monsieur s’avance avec sa canne dans la main

Et tout là-haut le vent qui siffle dans les branches

Lui souffle la romance qu’il chantait petit enfant.»



Nous arrivions devant le porche de l’Eglise où, quelques minutes plus tard, le son des cloches carillonnantes nous invitait à pénétrer. Tandis que nos mères et grands-mères s’avançaient vers les bancs de devant, nous restions au fond avec nos pères. Ils voyaient ainsi un moyen de pouvoir s’éclipser à tour de rôle quelques dizaines de minutes, quand le prêche du curé commençait de les ennuyer… Nous, les enfants, nous étions ravis de pouvoir regarder la crèche, tout en écoutant l’histoire de la naissance de Jésus qui ne nous semblait pas tellement éloignée des contes que nos parents nous lisaient. Ce qui nous plaisait surtout, c’était de croquer le morceau de pain à l’anis, spécialement préparé par le boulanger le jour même, et de chanter les cantiques, nos voix s’élevant pour résonner sous la voute de l’Eglise illuminée et glaciale…



« Il est né le divin enfant,

Jouez hautbois, résonnez musettes,

Il est né le divin enfant,

Chantons tous son avènement

Depuis plus de quatre mille ans »



« Douce nuit, sainte nuit !

Dans les cieux ! L'astre luit.

Le mystère annoncé s'accomplit

Cet enfant sur la paille endormi,

C'est l'amour infini ! »



Mais c’est transis et excités par l’attente que nous sortions en courant de l’Eglise vers 22h30, impatients de retourner dans la maison pour nous réchauffer et ... Invariablement, quand nous arrivions devant le portail du jardin, mon grand-papi sortait de la maison en criant, simulant la colère : « Et voilà, pendant que vous étiez là-bas, à perdre votre temps en écoutant les balivernes de cette soutane de malheur, vous avez loupé le Père-Noël ! Vous auriez mieux fait de rester avec moi, bien au chaud, au lieu d’aller vous geler à l’église ! Pendant ce temps, moi, j’ai discuté avec lui et je peux vous assurer d’une chose : c’est qu’il n’a pas de croix autour du cou mais que par contre, il est bien rouge ! » Et il partait d’un grand éclat de rire, ravi de son pied de nez qui visait à la fois les curés et les américains, sous le regard courroucé de sa femme, tout en entonnant son chant de noël à lui, l’ancien résistant communiste…



« Debout ! Les damnés de la terre !

Debout ! Les forçats de la faim !

La raison tonne en son cratère,

C’est l’éruption de la fin.

Du passé faisons table rase,

Foule esclave, debout ! Debout !

Le monde va changer de base :

Nous ne sommes rien, soyons tout !

C’est la lutte finale, groupons-nous et demain,

L’Internationale sera le genre humain … »



Et pendant que nous nous précipitions vers le sapin, il nous regardait passer, heureux de nous voir réunis autour de lui et peu inquiet de ce que pouvaient penser les voisins. A bien y regarder entre ces deux utopies, je me dis aujourd’hui que l’idéal de partage des richesses entre tous n’était au fond peut-être pas si éloigné de la générosité de l’esprit de noël… Car dans la maison, c’était alors la grande distribution des cadeaux. Il y en avait pour tout le monde, même les adultes, mais c’est surtout les enfants qui étaient gâtés. Nous passions ensuite la soirée à découvrir nos nouveaux jouets tandis que nos parents s’installaient à table pour déguster un bon repas. Ce n’est que tard dans la nuit que nous rentrions enfin à la maison, et, bercés par la chaleur et le bruit du moteur, je finissais par m’endormir dans la voiture, les rêves encore emplis du bonheur de la soirée…



« C'est la belle nuit de Noel

La neige étend son manteau blanc

Et les yeux tournés vers le ciel

A genoux, les petits enfants

Avant de fermer les paupières

Font une dernière prière.



Petit papa Noel

Quand tu descendras du ciel

Avec des jouets par milliers

N'oublie pas mon petit soulier.

Mais avant de partir

Il faudra bien te couvrir

Dehors tu vas avoir si froid

C'est un peu à cause de moi.



Le marchand de sable est passe

Les enfants vont faire dodo

Et tu vas pouvoir commencer

Avec ta hotte sur le dos

Au son des cloches des églises

Ta distribution de surprises.

Myriam