Destination : 314 , Après


Les Mots

Les mots sont dits.



Il y a d’abord le silence,

Quelques minutes interminables

Le temps qui s’arrête, le temps de réaliser,

Le temps de compter jusqu’à combien ?

C’est l’instant fragile où tout bascule,

Ce n’est déjà plus avant et pas encore après,

Pas encore tout-à-fait.



Les mots font sens.



Et puis soudain, c’est le cri.

Immense, venu du plus profond de soi,

Il s’élève dans le silence,

Comme un orage dans un ciel d’été

Aussi soudain, violent, imprévisible.

Strident, perçant, déchirant

Ce n’est plus un être humain,

C’est animal, c’est viscéral,

Un réflexe archaïque venu du fond des âges.



Les mots sont compris.



L’effondrement sur soi,

Les larmes qui ruissellent

Le cri devient gémissement.

Le corps s’affaisse, s’enroule autour du cœur

Comme pour essayer de la protéger de sa douleur.

C’est impossible, la déchirure est faite,

Le vide est immense, le gouffre abyssal,

Une souffrance atomique,

Aux retombées infernales.



Les mots sont des images.



Vient le moment de la colère,

L’indignation, l’injustice,

L’envie de tout foutre en l’air,

D’anéantir, de tout détruire,

A commencer par soi.

Il n’y a pas d’explication,

Pas de compréhension possible,

Les « si j’avais su », « on aurait dû », « on aurait pu »,

Sont des milliers d’échardes vives.



Les mots convoquent les souvenirs.



Sans jamais se résigner vraiment,

On apprend à faire avec,

Avec le vide, avec l’absence,

Avec les « plus jamais » qui nous poignardent.

Cela peut prendre six mois, dix ans,

On apprend à vivre avec ses souvenirs.

On se tourne vers ceux qui restent,

On continue à aimer, à donner,

A demander de la tendresse.

Rien ne remplace mais la béance cicatrise,

La vie est là, farouche et obstinée.



Les mots nous accompagnent.

Myriam